Saga africa..........sur les traces de Samory
L’Afrique, comme les autres continents, a une riche histoire et c’est avec passion que je me suis plongé, dès mes premiers
séjours, dans les ouvrages de Cornevin, Coquery, Julien, Ki Zerbo, et Biarnes avec un intérêt plus particulier pour la période de colonisation (lire « le bon et brutal temps des
colonies » et « le retour »). S’il est un personnage africain légendaire de cette période c’est bien Samory Touré le farouche résistant à la colonisation française. (Côté
personnages français emblématiques il faut citer Brazza et Faidherbe, les « missionnaires de la république » )
« Il n’est pas exagéré de dire que Samory s’est montré supérieur à tous les chefs
noirs qui ont été nos adversaires sur le continent africain. Il est le seul ayant fait preuve des qualités caractérisant un chef de peuple, un stratège et même un politique. Conducteur d’hommes,
en tout cas il le fut, possédant l’audace, l’esprit de suite et de précision et, par-dessus tout, une ténacité irréductible, inaccessible au
découragement.» Ce témoignage, rapporté par Ahmadou Kourouma, dans un texte consacré à la capture du fier Malinké, est du Général Baratier. L’Almany Samory aussi
surnommé par le général Gouraud, qui le captura, le « nouvel Attila » et par d’autres le « Napoléon des savanes ». L’histoire de ce personnage, résistant sanguinaire, m’a
fortement marqué.
Je pense que c’est cet intérêt qui m’a décidé en début d’année 1982 à accepter une courte mission de 8 à 9 semaines en
Guinée. La Guinée où naquit Samory vers 1830. . Il faut dire aussi que j’étais inoccupé à cette époque car le chantier sur lequel je travaillais en Alsace, depuis 1979, était arrêté jusqu’aux
beaux jours à savoir fin avril ou début mai….. et puis quelques semaines en Afrique ça ne se refuse pas, même si le travail que je devais y faire, n’avait pour moi guère d’intérêt technique. En
fait j’accompagnai un ponte de la géotechnique, M. Lesourd, qui étudiait un avant projet de barrage. Il avait déjà fait plusieurs séjours sur le site et pour cette nouvelle phase, peut être un
peu plus sportive, et étant proche de la retraite, il avait un besoin d’un renfort.
Après le Zaïre de Mobutu…., j’allais connaître la Guinée de Sékou Touré…. dans la famille des dictateurs, après l’agent de
la CIA, j’allais vivre quelques semaines dans le pays du récipiendaire du prix Lénine. En fait je n’ai guère eu le temps de porter un quelconque jugement : les pauvres gens en Guinée me
semblaient aussi pauvres et aussi nombreux qu’au Zaïre…. peut être y avait-il une différence dans le fait qu’à Kinshasa on voyait des signes extérieurs de richesse (voitures, villas, hôtels…) ce
qui m’a semblé, a priori, être moins le cas à Conakry…. mais je reste prudent.
Bien sûr j’avais entendu parlé de Sékou Touré qui était, disait-on, un petit-fils de Samory. Sékou Touré qui avait dit non
à De Gaulle, lors du référendum de 1958, refusant ainsi d’intégrer l’union partenariat avec la France et choisissant une indépendance totale, politique, économique, et surtout en refusant,
malheureusement pour son pays la protection du Franc CFA. ( La monnaie de Guinée était le sylis, l’éléphant si je me souviens bien ce qui ne veut par dire pour autant que cette monnaie
inconvertible pesait lourd ). Je savais aussi très bien que Sékou Touré était tristement célèbre pour le sort qu’il réservait à ses opposants… j’avais entendu parler (lecture de
« Jeune Afrique ») de l’effroyable camp de concentration de Boiro où des dizaines des milliers d’opposants furent assassinés après d’atroces tortures…….
Nous avons fait le voyage le 20 janvier et, après une escale à Dakar, nous avons atterri à Conakry vers 23 H. M. Lesourd
qui avait déjà fait plusieurs voyages me glissa à l’oreille qu’il fallait prendre notre temps et descendre parmi les derniers et ne pas trop se presser pour récupérer les valises. Moi, je
commençais à être bien crevé et ne rêvant que d’un bon lit, je ne voyais guère de raison de perdre encore du temps….mais le chef ayant toujours raison….j’obtempérai….. Je compris ensuite
pourquoi : les douaniers guinéens étaient plutôt du genre tatillon et ont effectué une fouille minutieuse des 10 premiers voyageurs, sans doute tous des premiers séjours, car au
bout de 20 minutes la lumière fut éteinte, et tous les autres voyageurs ont pu rejoindre, les véhicules qui les attendaient dans la plus complète indifférence douanière.
Le lendemain matin après un bref passage au ministère et au laboratoire des travaux Publics, nous partions dans
l’après midi pour Fria.
Fria se trouve à environ 160 km au nord ouest de Conakry au bord du fleuve Konkouré en Basse Guinée c'est-à-dire assez loin
de la Haute Guinée, le pays Kérouané d’où était originaire Samory.
C’était une ville « champignon » surgit de la brousse, vers 1950, pour y exploiter la bauxite, puis y
construire une usine d’alumine. C’est Péchiney qui avait implanté ce site et dans les années 1982, malgré les rapports glaciaux entre la France et la Guinée (surtout pendant la période
gaulliste puis améliorés avec Giscard) Pechiney était toujours présent.

La route joignant la capitale à Fria était en très mauvais état, mais c’était me disait Lesourd ce qu’il y avait de mieux dans le pays : du moins celle-ci avait un semblant de revêtement bitumineux. Je voulais bien le croire vu l’état de la voirie à Conakry.

La route joignant la capitale à Fria était en très mauvais état, mais c’était me disait Lesourd ce qu’il y avait de mieux dans le pays : du moins celle-ci avait un semblant de revêtement bitumineux. Je voulais bien le croire vu l’état de la voirie à Conakry.
La région de Fria, zone de savane forestière au bord du Konkouré, était très jolie.
C’est au bord de ce fleuve que j’ai eu l’occasion de voir, d’un peu trop près à mon goût, des crocodiles et constater leur extraordinaire vivacité
C’est au bord de ce fleuve que j’ai eu l’occasion de voir, d’un peu trop près à mon goût, des crocodiles et constater leur extraordinaire vivacité
M. Lesourd était en charge d’une étude avant projet d’un barrage à boues retenant les déchets rejetés par
l’usine stockés pour consolidation en place et éviter que ces boues ne polluent le Konkouré. Si je me souviens bien il y avait d
éjà un barrage presque plein, Dotté
1 ; Dotté 2 devait être prochainement être construit et il était temps, à l’horizon de la décennie 90, de prévoir le projet de Dotté 3. C’était la mission de M. Lesourd, et lors de ce
séjour nous devions rechercher les matériaux pour le futur ouvrage. Mon rôle était assez sommaire, il fallait mettre en place des équipes de puisatiers sur différentes zones d’emprunt, veiller à
l’échantillonnage à l’identification des prélèvements et de leur transfert au laboratoire de Conakry.

Je fus effrayé de voir comment les puisatiers locaux, des soussous, pouvaient descendre des puits, sortes de cheminée,
d’environ 0.80 m à 1 m de diamètre, sur des profondeurs de 10 à 12 mètres dans la latérite. Je crois même me souvenir qu’un des puits fut poussé à plus de 15 mètre. Ils travaillaient à deux, l’un
en bas à creuser avec une petite pioche munie d’un manche très court, le second en haut remontant les matériaux avec un seau et une corde. J’ai été aussi impressionné de voir comment ces ouvriers
acrobates descendaient et remontaient de ces puits dans lesquels ils faisaient en paroi des cavités-marches….. et tout ça pour quelques poignées de Sylis. La latérite « sèche » se tient
comme un véritable béton ….mais, sensible à l’eau, attention les dégâts quand elle s’humidifie. Ces quelques semaines furent pour moi une nouvelle grande expérience humaine.
J’ai aussi découvert un attachant personnage en M. Lesourd que je connaissais un peu mais dans son bureau à Paris, et pas
forcément sous son meilleur jour car il avait un côté bourgeois conservateur, J’ai compris pourquoi il prenait du temps à récupérer sa valise à l’aéroport en arrivant, attendant surtout
l’évacuation pour cause d’extinction des lumières. Dans sa valise il y avait des missels, qu’il distribuait aux enfants guinéens le dimanche à sortie de la messe, dans ce pays ou le christianisme
n’était pas en odeur de sainteté….. et au cours du séjour il dut rentrer en France une quinzaine de jours pour un colloque géotechnique ( d’ou la vraie raison de ma présence à ses
cotés au cours de cette mission) ; le premier dimanche après son retour il a effectué une nouvelle distribution de missels.
J’ai aussi de très bons souvenirs de personnes rencontrées sur le site, des guinéens dont un ingénieur qui se nommait
Camara comme, sans doute, un pourcentage non négligeable de guinéens, mais aussi des français de Péchiney ; et puis il y avait aussi Jean Marie un gars de mon âge, un niçois, qui était
arrivé par le même avion que nous, et qui attendait l’arrivée de sa famille. En soirée Jean Marie, nous régalait avec sa guitare et son répertoire rock & roll notamment celui des
Beatles ; Nous avions encore de curieux libyens comme compagnons de la base vie, mais qui ne semblaient pas trop apprécier la musique décadente de Jean Marie. Enfin j’ai souvenir des
interminables attentes du mercredi après midi à la poste lorsque j’essayais d’entrer en contact téléphonique avec ma famille …. 2 à 4 heures pour joindre Conakry……. après pour la France ça allait
assez vite.
Je suis rentré à la maison le 16 mars, la veille du premier anniversaire de mon fils Didier.
Je suis rentré à la maison le 16 mars, la veille du premier anniversaire de mon fils Didier.
Comme je cherchais, hier, sur Internet (site : http://www.friainfo.over-blog.com) quelques informations sur Fria pour rafraichir ma mémoire et faire ce billet, j’ai appris que le 1er
barrage de Dotté avait cédé en août 2007 suite à des pluies diluviennes l'écoulement des boues menaçant le dernier barrage celui de Dotté 3 qui avait été réalisé en 1992. ..... Il semble
toutefois que la catastrophique écologique fut évitée.... et que le Konkouré ne fut pas pollué par les déchets des boues sodiques.
(à suivre)
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