Moment de vie....... Etre ou ne pas être.
La question ne se posait pas le 7 janvier dernier quand j’ai appris le carnage abominable de ‘’ Charlie Hebdo ‘’. Dès 20h j’ai fait un billet au titre incongru « Balles tragiques à Charlie Hebdo » en hommage à la ‘’une’’ de ‘’Hara-Kiri’’, l’ancêtre de ‘’Charlie Hebdo’’, du 16 novembre 1970 qui annonçait ainsi le décès du Général De Gaulle : «Bal tragique à Colombey : un mort.». Le mort en question fut d’ailleurs Hara-Kiri qui, pour avoir scandalisé la France conservatrice, fut interdit de parution. Sept jours plus tard naissait un nouveau journal ‘’Charlie Hebdo’’ avec la même équipe éditoriale. ‘’Charlie Hebdo’’ que des barbares ont assassiné ce mercredi 7 janvier 2015.
La question ne se posait donc pas : j’étais naturellement et immédiatement ‘’Charlie’’ et je le criais fort ! La suite ce fut les trois journées d’horreurs avec la prise d’otages dans la supérette casher, 17 victimes innocentes, et un peuple de France bouleversé qui manifestait le samedi et le dimanche. Près de deux millions de personnes dans les rues pour revendiquer ou affirmer en vrac leur horreur, leur colère, leur fierté, leur fraternité, leur désir d’unité, la liberté d'expression.
Puis ce furent les jours d’après avec la renaissance de ‘’Charlie Hebdo’’. Ce premier ‘’Charlie Hebdo’’ post-attentat je voulais l’acheter par solidarité, tout en me considérant quelque peu faux-cul, moi qui avais certes souvent feuilleté ce canard en kiosque, mais sans en avoir jamais acheté un seul. De plus, j’ai voulu la jouer malin : je savais que, pour les premières livraisons, l’offre serait inférieure à la demande, aussi inutile de se présenter à 6h du mat à la gare, avec le 1er train pour Paris à 6h 20, là je n’avais aucune chance. Idem à la Maison de la presse au centre ville avec une ouverture à 9h plus confortable mais là aussi c’était perdu d’avance. Il me restait alors les centres commerciaux et ça tombait bien car je devais me faire couper les cheveux : Rendez-vous prit pour 9h30, ça me laissait le temps de récupérer le journal, de prendre un café puis de présenter ma tignasse au merlan.
Que de monde il y avait à attendre l’ouverture des portes ! Puis quelle précipitation, quelles courses avec ou sans bataille de caddies ! Délaissant l’entrée du magasin principal, la cavalerie, façon Ben Hur, se dirigea dans sa grande majorité vers la boutique de presse. Moi, tel Lino Ventura dans ‘’L’Armée des ombres’’ je refusais de courir. A l’arrivée à l’autel, une quinzaine de ‘’Charlie Hebdo’’, attendait plus d’une cinquantaine de personnes excitées. Il y eut quelques prises de bec « Moi Monsieur j’étais devant la porte bien avant vous ! » « Peut-être mais moi je suis arrivé à la boutique avant vous ! » Puis, progressivement ça se calma ; les quinze élus s’éloignèrent heureux d’avoir gagné à la course au trésor, les autres cachèrent leur déception en se reportant sur d’autres hasards, au grattage ou au tirage, en se réfugiant dans une autre déception plus coutumière. Moi j’ai acheté mon ‘’Midi Olympique’’ hebdomadaire et j’ai poursuivi mon petit bonhomme de chemin comme si de rien n’était : un café avec un croissant, le coiffeur puis retour à la maison. Pendant la séance de coiffure j’ai analysé la situation : si je restais de tout cœur ‘’Charlie’’ je ne me sentais plus tenu de reprendre tous les matins de la semaine, voire plus, la chasse au nouveau dahu. Après tout m'étant passé de ‘’Charlie hebdo’’ pendant plus de quarante ans, je pouvais bien continuer. J’espère ne pas choquer en écrivant ça, ne serait ce que par respect pour les victimes. D’ailleurs j’appréciais énormément Bernard Marris, et j’aimais bien les dessins ou caricatures de Cabu, Wolinski et autres qu’on trouvait aussi dans d’autres journaux. Enfin ces tristes circonstances m’ont permis de faire connaissance avec d’autres comme Charb le directeur de la revue : un type vraiment très bien.
Cette tragédie qui a surgi dans nos vies début janvier a quelque peu éclipsé les autres aspects ; Il est vrai que beaucoup de vœux n’ont été transmis que par mails sans être forcément relayés ensuite par un coup de téléphone aux amis pour avoir des nouvelles. J’ai quand même joint ceux que je n’avais pas vus l’année dernière comme mes potes Pierrot de Strasbourg, Jean d’Agen, Alain de Toulouse. Quand à mes vieux compères du rugby comme on doit se retrouver en mars, les vœux attendront bien jusque là !
Nous étions heureux d’être invités le samedi 3 janvier à un apéro dinatoire pour fêter la nouvelle année. Une super soirée fraternelle très agréable entre amis. Vers minuit nous nous sommes séparés retournant les uns et les autres vers nos véhicules. Moi j’avais du me garer, faute de place, sur un parking de supermarché, éloigné de quelques centaines de mètres. Quand j’ai voulu mettre le contact, rien. Panne de batterie, que faire ? Contacter les amis qui avaient déjà pris la route, pour que l’un d’eux face demi-tour pour nous aider. Sonner chez nos hôtes qui étaient en train de ranger, voire peut-être déjà sur le point de se coucher. Il faisait doux, une petite dizaine de degrés, il ne pleuvait pas, on avait bien mangé et un peu bu, une opération jogging était à envisager le lendemain et comme il était plus de minuit on était donc déjà le lendemain, autant faire de la marche immédiatement. Trois, peut-être quatre kilomètres ça se fait en 45 minutes ; Exact ! A 0h45 nous étions chez nous et nous y avons passé une très bonne nuit. Une excellente résolution dès les premiers jours de l’année. Le lendemain nous revenions chercher la voiture et, avec des pinces raccordant les deux véhicules, elle est partie du premier coup. 50 km de route en campagne pour recharger la batterie et tout était rentré dans l’ordre.
Quelques petits soucis de santé évoqués dans le précédent billet de cette rubrique, intitulé « Respire » qui ont entraîné une révision poussée. Les derniers examens de type cardiologique ont été effectués début janvier, dont le test d’effort. Bilan plus que satisfaisant, j’ai fait exploser mon record vieux de 4 ans. Je peux repartir crapahuter un peu partout à travers le monde, avec une petite préférence pour les zones tropicales
Pour commencer j’ai crapahuté dans Niort le samedi matin 10 janvier pour dire que j’étais ‘’Charlie’’. Il y avait beaucoup de monde et c’était bon enfant. Une partie de la foule s’est regroupée devant la Mairie de Niort et le reste s’est étendue jusqu’aux rues piétonnes bien au-delà du Marché. Ca pouvait bien faire 4000 personnes. Le nouveau maire de Niort, sur le parvis de l'hôtel de ville, a fait le discours qu’il fallait, très républicain, ponctué par les mots Liberté, Egalité Fraternité…. Quand de la foule une voix de stentor à ajouté Laïcité. Le maire, quelque peu surpris a repris un peu timidement le mot laïcité. De très nombreuses voix se sont alors unies pour reprendre en chœur Laïcité et le nouveau maire un peu gauchement (alors qu’il est bien ancré à droite) a voulu avoir le dernier mot en reprenant la fin de son discours et en ponctuant de façon équilibrée les mots : Liberté, Fraternité, Egalité et Laïcité... et alors il fut applaudi. Une généreuse Marseillaise clôtura ensuite la cérémonie.
Le dimanche était le jour de manifestation à Paris et dans les plus grandes villes de France. Avec un groupe d’amis marcheurs de notre quartier nous avions programmé, comme chaque deuxième dimanche du mois, une balade Celle-là nous entraînait dans la vallée de St Néomaye, pour un circuit d'une douzaine de kilomètres particulièrement humide et même boueux après les pluies des dernières semaines. Bien sûr pas de slogan, on était en campagne, mais chacun avait sur lui quelque chose de ‘’Charlie’’ à commencer par les badges de la veille. C’est vrai qu’on n’en a pas trop parlé pendant la promenade, tellement occupés que nous étions à voir où l’on mettait nos pieds pour éviter de se casser la gueule.
L’après-midi j’ai essayé de trouver un équilibre entre communier avec les marcheurs de Paris si nombreux et les personnalités du monde entier entourant un François Hollande qui faisait honneur à sa fonction et à la France. Il me fallut quand même m’échapper une petite heure pour aller au stade Espinassou voir la seconde mi-temps du match de rugby Rouen/Niort. Rouen le leader invaincu de la poule 2 de Fédérale 2 se déplaçait chez le 3ème du classement. Quand je suis arrivé au stade, Niort menait 15 à 3. En seconde mi-temps les niortais continuaient à dominer outrageusement mais cet enfoiré d'arbitre avait manifestement envie de donner un coup de main à Rouen et il lui fallut arriver à la 83ème minutes du match et à force de favoritisme pour que Rouen l’emporte sur le fil 16 à 15. Un scandale et inutile de préciser qu’à ce moment là, la fraternité n’était plus de mise. Je me suis dépêché de rentrer à la maison pour retrouver mon poste de télévision et revenir communier avec un des grands moments de l’histoire de France.
Le lendemain lundi la vie normale reprenait son cours et moi, le lundi après midi j’ai tournoi de régularité au Bridge club. Avec mon partenaire Morris nous jouons régulièrement deux fois par semaine, une fois en tournoi le lundi et une fois en partie libre et de formation le mercredi. Nous sommes des joueurs moyens mais volontaires. Nos partenaires et néanmoins adversaires jouent pour la plupart 3 à 5 fois par semaine ils sont donc plus sérieux ou accros. Chaque lundi depuis 2 ans, nous rencontrons 15 à 16 équipes et régulièrement nous finissons parmi les mal classés. Nous nous traînons le plus souvent entre la 9ème et la 13ème place, mais attention, nous n’avons jamais fini derniers. Eh bien ce lundi 12 janvier, à la surprise générale,..... nous avons terminé premiers. Ni Morris ni moi n’avons vraiment compris ce qui s’était passé. On en était même gêné, surtout moi, qui ai un peu une réputation de farfelu de l'annonce. On dit que je ‘’pokérise’’ quelque peu, la pire des insultes pour un vrai bridgeur. Mais moi comme ça ne me dérange pas trop, il est donc probable que je ne suis pas tout à fait un vrai bridgeur. Que s’est-il passé ? Nous étions comme sur un nuage. Un souffle élyséen avait du passer sur nous.
Les jours suivants furent d’abord marqués par la sortie du nouveau « Charlie Hebdo » déjà décrite et commentée en introduction à ce billet. J’avais décidé de ne pas acheter ce numéro spécial. J’étais Charlie, mais je n’étais pas Charlie-Hebdo. Puis nous vîmes à la télévision des images de manifestations violentes anti-Charlie-Hebdo, anti-France, anti-français dans des pays musulmans. Ces manifs sont évidemment très excessives et surtout très, trop organisées. Je suis un laïque militant, mais j’ai aussi travaillé et donc vécu de longues années, comme expatrié en Afrique musulmane. J’ai toujours respecté les gens avec qui je travaillais et je fus même souvent ému de leur ferveur en les voyant faire leurs prières dans la journée. Je sais qu’il faut respecter les religions et éviter les provocations mais où est-il dit que le personnage en larme qui pardonne, de la première page du journal est le prophète? Je trouve même très belle cette page sur fond vert, mais laissons passer la crise et que la diplomatie française fasse pour le mieux.
Pour avoir été dans ce type de situation, notamment à Yaoundé en 1984, j’ai aussi pensé aux expatriés français qui vivent dans ces pays. C’est le cas d’amis dont le jeune fils vit dans l’un de ces pays du Sahel. Ils nous ont envoyé un SMS mardi soir pour nous dire qu’ils avaient peur pour lui. Nous les avons rappelés et avons longuement discuté avec eux.
Là-dessus, je me suis ramassé un bon rhume bronchite et j’ai beaucoup fainéantisé, étudié (notamment pour écrire les billets sur Nicolas Baudin sur le blog).
J’ai aussi été très attentif à l’actualité notamment européenne. Des décisions de Mario Draghi d’injecter massivement des liquidités dans la zone euro afin de lutter contre le risque de déflation et booster un peu la croissance et jusqu’aux élections législatives en Grèce et le saut dans l’inconnu de ce peuple humilié. J’ai beaucoup consommé ‘’C dans l’air’’ en janvier, est-ce cet excès qui m’a incité à brocarder cette émission dans mon dernier billet. Je n’ai pas trouvé la réponse lors de mon travail sur l’album ‘’ La planète des sages.’’
J’ai pas mal lu aussi, des bouquins qui traînaient depuis des semaines sur ma table de nuit, dont celui de notre sympathique voisine Delphine Batho, «L’insoumise» que j’ai adoré. C’est cette lecture qui m’a incité le 31 décembre à régler ma cotisation 2014, pour voir et pour pouvoir voter pour ceux que j’aime, lors du prochain congrès, voilà pour le temps des aveux. En fait, question don, c’était ça ou les restos du cœur et il m’a semblé que le PS était en bien plus en mauvais état que les restos….. Ce fut mon choix mais c’est vrai que c’est discutable.
J’ai lu aussi deux romans policiers de François Robin que j’ai eu le plaisir de rencontrer en mars dernier à Maillezais chez nos amis Per et Margaid. Je ferai dans quelques semaines un billet pour ces deux polars « Après la Mangrove » et « Landerneau en campagne ».
Mon fils Didier m’avait offert pour Noël, un petit livre dont il avait vu la promotion dans l’émission de Ruquier. « Lis-ça et tu verras tes illusions de jeunesse s’envoler » m’avait-il dit. J’ai lu et bien apprécié « Tristesse de la terre » d’Eric Vuillard, ou la vraie vie de Buffalo Bill mais j’ai pu dire à mon fils que je connaissais parfaitement cette histoire pour avoir vu, dans les années 70 le film de Robert Altman « Buffalo Bill et les indiens » avec Paul Newman, Burt Lancaster et Harvey Keitel.
Question cinéma, entre actualité chargée, bronchite et temps hivernal je n’en ai pas abusé, mais je ne pouvais pas louper la projection en avant-première du dernier film de Jean-Jacques Annaud, « Le loup », avec la présence et les explications et commentaires après projection du réalisateur. Je n’en dis pas plus à ce stade car je vais faire un billet ciné-cure sur ce film et la formidable filmographie d’Annaud, dans quelques jours, pour la sortie nationale de ce film.
Je suis quand même allé voir quelques films en ce début d’année :
‘’A most violent year’’ de J.C. Chandlor, plutôt bien mais loin du précédent, ‘’Margin Call’’.
‘’L’affaire SK1’’ de Frédéric Tellier, avec Raphaël Personnaz et Olivier Gourmet. Plutôt décevant.
‘’ Invincible’’ d’Angelina Jolie, dans le genre ‘’Pont de la rivière Kwai’’ et donc une histoire intéressante, mais un film ambitieux, un peu long.
Samedi dernier nous avions invité des amis à la maison, pour une soirée plutôt espagnole et même andalouse très sympathique.
Le lendemain, dimanche, nous étions chez notre fille pour l’anniversaire de notre petit fils Thomas. Pour ses 11 ans il voulait une jolie guitare et elle était vraiment jolie. Reste à entendre ses premiers accords.
Fin de rédaction sans conclusion.
Ah si ! J’allais oublier. Vendredi dernier je suis allé acheter quelques bricoles à l’Intermarché voisin et quelle ne fut pas ma surprise de tomber sur un lot de ‘’Charlie Hebdo’'…. Il y en avait une bonne dizaine et personne autour à se les disputer. Du coup j’en ai pris un. Encore une B.A. pour trois euros. Je l’ai à peine feuilleté, mais j’ai tout mon temps car ça restera certainement mon unique exemplaire. Désolé mais ce n’est vraiment pas ma tasse de thé à la menthe. Mais l’essentiel est qu’il puisse paraître librement et dire toutes les conneries qu’ils veulent dire.
(A suivre)