Philo bath... Philosophes de la Grèce antique (1) : Les sept Sages.
Comme on n’a, certainement, pas fini de parler de la Grèce en cet été torride je vais sur ce blog me plonger dans l’analyse de l’esprit grec chez les illustres penseurs érudits de l’Antiquité: philosophes, rhéteurs, hommes politiques où historiens. Pour m’aider j’ai un remarquable livre de Papadogeorgos Georgos « Hommes illustres de la Grèce Antique » (en version française) acheté à Athènes en mai 2012. J’ai aussi quelques vieux livres de philo à dépoussiérer et, comme tout le monde je cherche sur Internet où l’on peut trouver de tout y compris découvrir, avec un peu de chance, Diogène Laërce un biographe et poète du IIIe siècle dont on ne sait presque rien hormis un livre, un ouvrage exceptionnel, « Les vies des plus illustres philosophes de l’Antiquité ».
Dans ce premier billet je vais me pencher sur les « Sept sages » ceux qui constituèrent, au VIe siècle avant J-C, le fondement spirituel de la philosophie et qui furent les tout premiers ‘’Présocratiques’’. Tous (*) devinrent célèbres en raison de leur sagesse sociale et politique, mais aussi pour leur sens de la mesure.
(*) On verra un peu plus loin qu’il y a débat pour ce qui concerne Périandre de Corinthe.
Thales de Milet (624-649 av. J.C) est considéré comme le fondateur de l’école ionienne de philosophie. Il fut le premier à se détacher de l’interprétation religieuse et mythologique du monde et des phénomènes naturels, qui prévalait à l’époque, en déclarant que la principale source de création du monde était la matière et plus précisément l’eau. Il fut aussi un grand scientifique en mathématique, en astronomie et mécanique. Il élabora les plus essentiels théorèmes de géométrie. . Il fut aussi le premier à parler des éclipses (il aurait prévu celle de 585 av. J-C) et à définir les solstices. Il eut aussi, comme Ingénieur ou comme conseiller, un grand rôle politique. Thales fut très estimé dans le monde de la mer Egée et au delà, en raison de sa compétence et de sagesse.
« Il est difficile de se connaitre soi-même. », « Ne dis pas ce que tu as l’intention de faire car si tu échoues, tous riront de toi » « Le passé est certain, le futur incertain » « Entoure-toi de gens capables » « Le temps est le plus sage, il révèle tout » sont des principales maximes qui lui sont attribuées.
Solon l’Athénien (624-549 av.J-C) : issu d’une famille d’aristocrates, il reçut une bonne éducation, il se distingua dès sa jeunesse dans le domaine du commerce puis devint poète, législateur, conseillé politique et philosophe.
En 594 av. J-C, les Athéniens lui donnèrent le pouvoir en l’élisant ‘’Archonte’’. Il devait remédier aux conflits qui opposaient les riches aristocrates et la classe populaire qui tombait facilement dans l’endettement puis l’esclavage. Solon décréta la ‘’Seisachhela’’. Cette loi abolit les dettes et annulait les emprunts avec hypothèque des terres ou de la personne qui devenait alors esclave. Solon libéra ceux que l’endettement avait réduits en esclavage. Sous sa gouvernance Athènes fit une avancée spectaculaire vers la démocratie et l’égalité sociale. Une de ses lois prévoyait la suppression des droits civiques à ceux qui ne s’intéressait pas à la vie publique.
Ces préceptes les plus connus sont : « On apprend chaque jour quelque chose de nouveau », « Il faut apprendre à obéir pour savoir commander » « Ne préconise pas les choses agréables mais les choses parfaites »
Pittacos de Mytilène (648-569 av. J-C) fut un personnage politique qui se distingua par sa retenue, sa discrétion et par son honnêteté politique. Il accorda même la liberté à l’assassin de son fils, en arguant du fait que « le pardon vaux mieux que les repentir.» Ses compétences politiques significatives sont prouvées par les nombreuses législations dont il fut l’auteur. On distingue notamment la loi imposant une peine double pour toute infraction commise en état d’ivresse.
Il se distingua très tôt par sa sagesse politique et son sens moral très prononcé. La légende dit que Crésus lui envoya, un jour en cadeau, une grosse somme d’argent. Ce dernier lui rendit immédiatement l’argent dont il dit n’avoir nul besoin.
Au bout de dix ans de gouvernance, jugeant avoir achevé son programme politique, il abandonna le pouvoir pour redevenir simple citoyen, en expliquant : «J’ai été effrayé de voir Périande de Corinthe Périandre devenir le tyran de ces concitoyens après en avoir été le père. Il est trop difficile d’être toujours vertueux »
Entre autres aphorismes on retient : « Crains ce qui est amoral » « La gestion du pouvoir révèle l’homme » « Ne t’enrichis pas à tort » « Apprends à apprécier avec justesse chaque situation » « Ne considérez personne comme favorisé par le sort avant qu’il ne soit mort »
Bias de Priène (VIe siècle av.J-C.) philosophe, poète, avocat et homme d'État grec se distinguait par sa sagesse, l’exactitude de son jugement et par ses talents de rhéteur. Il défendait les droits des plus faibles face à la justice, sans accepter la moindre rémunération. La légende veut que lorsque le roi de Lydie, Alyattes, assiégea Priène, il décida de laisser sortir de la ville deux mules très bien nourries. Alyattes surpris de voir des bêtes en aussi bonne condition estima que la ville n’était pas prête de se rendre. Il envoya un messager à Priène qui constata de très nombreux tas de grains. En fait, à l’initiative de Bias, sous les couches superficielles en grains il n’y avait que du sable.
Lorsqu’Alyattes fut informé de la capacité à résister longtemps de la ville il décida de conclure la paix.
Voici quelques tirades connues de Bias : « Prends par la persuasion et non par la force. », « Souhaiter l’impossible est une maladie de l’âme », « Fais de la sagesse ton arme, de la jeunesse à la vieillesse, car c’est ton bien, le plus sûr d’entre tous ».
Cléobule de Rhodes (Né vers 630 av. J.-C.. mort vers 560 av. J.-C..). Personnage à la fois historique et mythique, c’était un homme politique de la Grèce antique. Il fut souverain autoritaire de Lindos, l'une des trois cités de l'île de Rhodes. Il se caractérisait dit-on par sa force et sa beauté. Une légende fait descendre sa famille d'Héraclès. Il visita l'Égypte, où il étudia la philosophie et d'où il rapporta, dit-on, le goût de la poésie et des énigmes. Sa fille Cléobuline fut une poétesse reconnue C'est sous son règne que Lindos connut son apogée : il fit entièrement rénover le site et le temple d'Athéna Lindia.
Parmi ces innombrables recommandations, on peut retenir celles-ci : « La mesure est ce qu’il y a de mieux », « Ne fais rien avec violence », « Ne montre pas de fierté quand tu es riche, et ne sombre pas dans l’humilité quand tu es pauvre. » « De la mesure en tout. Faites du bien à vos amis pour vous les attacher davantage, et à vos ennemis pour en faire des amis. » « Il faut marier les filles quand elles sont encore des jeunes filles pour l’âge, et déjà des femmes pour la raison. »
Chinon de Sparte. (Il vécut au Vie siècle av. J-C.). C'était un philosophe et législateur à qui l'on doit notamment la très fameuse phrase « Connais-toi toi-même » gravée sur le fronton de l'oracle de Delphes. Il fut considéré comme l’un des sept sages en raison de sa réforme du régime de lycurgue (législation) en permettant aux éphores (magistrats) qui étaient de simples assistants des rois, dénués donc de rôle politique majeur, de pouvoir remplacer les souverains en cas d’absence ou d’incapacité à gouverner. Il considérait que l’une des qualités de l’homme était de pouvoir prévoir ou pressentir l’avenir par sa logique. Il se distinguait par la manière laconique avec laquelle il exprimait ses convictions.
Parmi ces nombreux apophtegmes on peut citer : « Que ta parole ne devance pas ta pensée. », « Hâte-toi dans les malheurs de tes amis plutôt que dans leur joie. » « Taire ce qu’il ne faut pas dire, bien employer ses loisirs, et savoir supporter l’injustice, voilà des choses difficiles.», « Mieux vaut une perte qu'un gain honteux ; dans le premier cas, tu n'auras à t'affliger qu'une fois, dans le second, toujours.», « Si tu es robuste, tiens-toi tranquille ; les autres te respecteront plus qu'ils ne te craindront. »
Enfin voilà Périande de Corinthe le dernier des sept sages, celui qui fait le plus débat et ce depuis l’Antiquité puisque Platon ne l’avait pas inclus sur sa listedans le ‘’Protogoras’’ lui préférant Myson de Chênée. Périandre était souvent mis dans les listes des Sept sages de Grèce pour certains de ses proverbes, même si Platon s'indignait qu'on confondît son intelligence avec de la sagesse.
Périandre de Corinthe (668-584 av. J-C.) fut tyran de Corinthe pendant plus de 40 ans. Il succéda à la tyrannie de son père Cypsèle. Au début il gouverna avec plus de clémence que son père, mais peu à peu il se livra à des injustices et des actes de cruauté. Afin d’affirmer son pouvoir il n’hésita pas à commettre des crimes abominables. Certains suggèrent que la gravité de ses actes fut probablement exagérée en raison de la haine que provoquait ce régime tyrannique.
Toutefois une chose est sûre, Périandre fut à l’origine de la splendeur de Corinthe. Du point de vue économique cette cité fut sous son règne la plus importante de Grèce, grâce à son commerce et son artisanat ; le développement de la marine en fit la puissance navale dominante de l’époque. Périandre limita le luxe et interdit l’achat d’esclave ; il interdit aussi aux ‘’oisifs’’ de se promener dans l’agora. Enfin Périandre défendit les lettres et les arts.
Parmi les règles ou commandements de Périandre on relève : « N’agis pas pour de l’argent », « L’imprudence est dangereuse » « Tiens la parole que tu donnes ».
Il faudrait aussi s’intéresser à Myson de Chênée un 8ème sage, celui du banc de touche mais le 7ème pour Platon l’initiateur de la liste. Mais je n’ai rien trouvé dans l’ouvrage de Georgos et Wikipédia n’est guère loquace. Voyons du côté de Diogène Laërce . Bingo !
http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/laerce/myson.htm
« Myson, fils de Strymon, comme dit Sosicrate en expliquant Hermippe, et originaire de Chénée bourg du mont Œta, ou de la Laconie, était du nombre des sept sages; on dit que son père avait usurpé la tyrannie. Quelqu'un a écrit qu'Anacharsis ayant consulté Apollon Pythien pour savoir qui était plus sage que lui, il reçut de la prêtresse une réponse pareille à celle qu'elle avait faite à Chilon, et dont nous avons parlé dans la vie de Thalès :
Je te déclare que Myson l'Aetéen, natif de Chénée, est plus sage que toi.
On ajoute qu'Anacharsis, s'étant mis là-dessus à le chercher, vint à son village, et que, l'ayant trouvé qui accommodait, en été, le manche de sa charrue, il lui dit : Myson, ce n'est pas à présent la saison de labourer; à quoi il repartit: C'est celle de s'y préparer. D'autres veulent que l'oracle le nomma Étéen, et sont en peine de savoir qui ce terme désigne. Parménide soupçonne qu'Étée est un village où Myson prit naissance. Sosicrate dans ses Successions, pense qu'il était de race éthéenne du côté de son père, et de famille chénéenne du côté de sa mère. Eutyphron, fils d'Héraclide de Pont, dit qu'il était né dans l'île de Crète, où il y a un bourg nommé Anaxilas au contraire le fait sortir du fond de l'Arcadie. Hipponax parle de lui en se servant de ces termes :
« Myson, ce philosophe dont Apollon éleva la sagesse au-dessus de celle de tous les hommes.»
Aristoxène, dans ses différentes Histoires, dit qu'il ressemblait beaucoup à Timon et à Apémante du côté des mœurs, en ce qu'il était misanthrope, et qu'on l'entendit rire seul, dans un lieu écarté de Lacédémone. Celui qui le surprit dans ce moment lui ayant demandé pourquoi il riait, n'ayant personne avec lui: C'est justement, dit-il, pour cela que je ris. Aristoxène dit que, tant par cette raison que parce qu'il était peu relevé par le lieu de sa naissance, qui n'était pas une ville, mais un simple bourg, il fut peu célèbre; et cela fut cause que plusieurs attribuèrent les choses qu'il a dites à Pisistrate le tyran, excepté Platon le philosophe, qui a parlé de lui dans son Protagoras, et qui le met à la place de Périandre.
Il disait que « ce n'est point par la science des paroles qu'il faut parvenir à la connaissance des choses, mais que c'est par l'étude des choses qu'il faut déterminer les paroles; parce que les mots sont pour les choses, et non pas les choses pour les mots. »
A suivre car je vais poursuivre mes devoirs de vacances pendant tout l’été. On n’a pas fini de parler de la Grèce !