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Didi.............Quand un soldat s'en va en guerre.......

28 Novembre 2007 , Rédigé par daniel Publié dans #Didi

     

« Fleur au fusil, tambour battant il va,
il a 20 ans, un cœur d’amant qui bat,
Un adjudant pour surveiller ses pas
et un barda contre son flanc qui bat,
Quand un soldat s’en va en guerre il a,
dans sa musette son bâton de maréchal
Quand un soldat revient de guerre il a,
dans sa musette un peu de linge sale…. »
 
   Didi s’est évadé de la prison d’Auxerre le 24 août 1944; il avait perdu  au moins 20 kgs après 12 semaines d’emprisonnement. Début septembre, très affaibli, il fut reçu en héros à Civry où il pouvait enfin, embrasser ses parents accourus de Champigny. Il fut, ensuite, soigné un temps à Villiers sur Tholon, au maquis Chevreuil. (Voir l’article « Didi du maquis à l’armée….»).
L’intégration des maquis dans l’armée de Delattre de Tassigny s’accéléra courant septembre et début octobre. Didi s’engagea, alors, au 1er régiment des volontaires de l’Yonne et rejoignit la caserne de Joigny, initialement centre du groupe Bayard du réseau britannique Buckmaster. C’est dans cette caserne où, grâce à l’appui de son ami le Lieutenant Marius B., il fut affecté d'abord aux cuisines, qu'il put, progressivement,se retaper, reprendre des forces, pour être courant novembre, au moment du branle-bas de combat, un bon petit soldat parfaitement remis en forme.

  Début octobre il écrivait à ses parents pour annoncer 2 bonnes nouvelles:
Joigny le 9 octobre 1944
Chers parents
 « …….Hier j’ai eu une grosse surprise ; Une prise d’arme au cours de laquelle le colonel m’a remis avec quelques camarades du maquis, la Croix de guerre avec citation. Je crois que ce n’est pas mal à 19 ans.
Il se pourrait que j’aille en perm. dans quelques jours car nous allons bientôt partir vers l’est.
La vie de caserne tire actuellement son train-train et je suis passé au ravitaillement du 4ème bataillon avec mon copain Marius…….. »
 
Fin octobre Didi eut sa permission et rentra quelques jours à Champigny. Ce court congé passé son père le raccompagna à Joigny et en profitait pour ramener la grand-mère Prieux qui était à Civry depuis mai.

  
Le 8 novembre 1944
Chers parents
 « …….Après être rentré de perm., lundi matin une surprise m’attendait : un nombre considérable de camions « américains » étaient là pour nous emmener dès le lendemain. Partis à 7 H du matin de Joigny. Nous sommes arrivés vers 23 H sous une pluie battante dans un bled situé entre Belfort et Besançon. Ne trouvant pas à cette heure là et sous cette pluie les cantonnements je me suis écroulé dans une grange où je me suis endormi.
Aujourd’hui il pleut un peu moins mais les terrains sont terriblement détrempés et les convois progressent avec difficultés, montant interminablement vers le front. Les coups sourds des canons nous chatouillent, un tantinet, les oreilles.
Après avoir traversé 4 départements c’est la 1ère fois que j’atterris dans l’est. Le pays n’est guère accueillant par cette saison.
Nous montons en ligne prochainement relever des marocains et autres nord-africains.…….. ». Votre nouveau soldat. André.
 
Le bled en question était Magny Vernois. Le lendemain ils se mirent en route pour le monument aux morts de Seinargent où ils eurent droit à la cérémonie d’armistice du 11 novembre avant de se rendre à Magny Danigon.
  
Le 12 novembre 1944
Bien chers parents
 « …….Je profite du calme dans le secteur pour vous écrire car je suis maintenant en 1ère ligne dans un petit village complètement rasé par les obus et où la neige a fait son apparition. Le moral est bon et les chefs sont chouettes.
Je suis agent de liaison et je parcours à pieds ou en moto les routes et les chemins défoncés par les obus et mortiers.
Maman as-tu des nouvelles de mon vieux Roger. Si, lui, au lieu de rentrer à Paris pour être ensuite obligé de partir en Allemagne, il avait rejoint l’armée d’Afrique, il serait avec moi car nous sommes en jonction avec les troupes marocaines et algérienne.
Je vous quitte en vous embrassant bien fort et je remets vite mon casque car les marmites recommencent à nous tomber dessus. Qu’ils sont gentils les boches de nous envoyer la vaisselle à l’heure du casse-croûte…. ». Bises, à bientôt, André.
 
La liaison postale ne marchait pas trop mal car la semaine suivante Didi recevait une lettre de ses parents. 

Le 18 novembre 1944
Mon petit Didi
« …….nous avons bien reçu ta lettre où tu nous dis être en 1ère ligne, ce n’est guère rassurant mon petit …….Après Auxerre, et sans nouvelle de Roger, il va falloir avoir encore du soucis de ce côté-là. Tu ne pouvais dons pas te tenir tranquille….enfin je t’approuve quand même et je suis fière de toi. Ecris nous le plus souvent possible pour nous rassurer sur ton sort car nous allons nous faire un mauvais sang du diable……Je laisse la plume à ton papa. Je t’embrasse très fort. Ta maman… »
 
Mon cher Garçon 
«  Le lendemain que je t’ai quitté à Joigny, j’ai appris à l’Isle que les camions qui vous emmenaient vers l’est étaient passés à Avallon. Donc finit pour vous la vie de service intérieur, te voici un vrai combattant, et à ce sujet je te rappelle d’observer la plus grande prudence car il ne s’agit plus de guérillas comme celles que tu as connues il y a quelques mois.
Tu devais rentrer à la Compagnie, hors rang, pour t’occuper des réparations du matériel ; ça ne semble pas avoir eu de suite car dans ta dernière lettre tu ne nous en causes pas, c’est regrettable car tu aurais été plus en sécurité que comme agent de liaison. Donne nous bien vite des nouvelles car vous êtes 2 absents et ton frère est bien muet. Ton père qui t’embrasse. Marcel. »
 
Ce même jour Didi écrivait à ses parents.
 
Bien chers parents
« …….Je pense que vous avez reçus mes premières lettres vous disant que je suis en 1ère ligne à quelques kilomètres de Belfort. Je suis agent de liaison avec un copain, entre ma compagnie et le P.C du commandant. Pour l’instant le secteur est calme à part quelques arrivées d’obus et la nuit les activités des patrouilles.
 Mais il vaut mieux que je me taise car je risque de voir ma lettre censurée si je cause de trop.
Ici la neige tombe depuis une semaine ce qui ne nous enchante pas car il ne fait guère chaud de coucher à la belle étoile. Ce matin un rayon de soleil est apparu. L’aviation nous soutient par leurs bombardements sur la tronche des voisins d’en face.
Depuis que nous sommes ici je n’ai pas encore vu un boche. L’autre jour comme j’étais aux avant-postes, et pour dérouiller ma mitraillette j’ai tiré en direction de leur position….mais, sans doute, pour me vexer ils n’ont même pas répondu. On a pourtant déjà eu un copain tué et 3 blessés. Je vous quitte en vous embrassant bien tendrement. Votre soldat. Didi.
   
Du 18 au 27 novembre sa compagnie se déplaça en permanence pour débusquer les petits bataillons allemands et les repousser vers le sud de l’Alsace. Le 23 de Magny Danigon à Fesches le Châtel et des reconnaissances jusqu’à la frontière Suisse, puis retour sur Allenjoie le 24, à Novillard le 25 et enfin à Montreuil le Château le 26 pour entrer en Alsace le 28 novembre et se cantonner à Traubach le bas. Le 29 novembre Didi informait ses parents de l’évolution dans une lettre qui croisait celle de ces parents des 27 et 28 novembre.
 
Dans cette lettre ma grand-mère annonçait 2 nouvelles à mon oncle, une bonne et une mauvaise.
 La mauvaise d’abord : Marcel, mon grand père avait été convoqué au contrôle économique pour non déclaration de matières premières pour son activité de fers à chaussures (pièces métalliques « récupérées » notamment à Bagnolet dans l’usine où ont travaillé Didi et un peu Roger entre 42 et 43, usine qui remettait en état les camions militaires allemands……Le fisc restant le fisc, Marcel fut condamné à 250000 francs, ramenés après explications à 50000 francs qu’il devait payer sous quinzaine. Ma grand-mère annonçait donc qu’ils avaient laissé le pavillon du Tremblay et qu’ils avaient emménagé dans un petit appartement à Champigny. (Quelques mois plus tard, héroïsme de mon oncle aidant, mon grand père, Marcel, sera rétabli dans ses droits, récupéra l’amende ce qui a permis de reprendre un pavillon au Tremblay près de la Marne.
La bonne nouvelle est que ma grand-mère Geneviève venait avec joie (ah mais !!!) de s’inscrire sur les listes électorales (merci De Gaulle).
 
Pendant ce temps là Didi était entré en Alsace où les choses très sérieuses allaient commencer

Aux armées le 29 novembre 1944.
 
Chers parents
 
Ne vous inquiétez pas si je ne vous écrit pendant quelques semaines. Ces 4 derniers jours nous avons fait plus de 40 km à cavaler après les boches. Nous nous trouvons dans un petit village alsacien au repos pour 48 heures. Dans le dernier petit village avant d’entrer en Alsace, nous avons eu un accueil chaleureux, les cloches sonnèrent à la volée. Des jeunes filles, nous embrassaient en pleurant de joie, nous offraient du lait, du cidre ou du kirsch et nous leur donnions des cigarettes et des biscuits.
 Je ne pense pas que je pourrais aller en perm de si tôt.
Nous sommes donc maintenant en Alsace depuis hier et ça ne me plait pas trop. Les habitants ne parlent pas tous français et ils ne nous ont pas du tout accueilli, comme leurs voisins la veille. On a quand même rencontré quelques bons français…….. Je vous quitte en vous embrassant bien fort, votre fils. Didi.
 
On verra par la suite que le jeune Didi se fera beaucoup d’amis parmi les Alsaciens……et qu’il continuera très longtemps à aller les voir tous les ans….
 
(A suivre)
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