Souvenirs en vrac..... d'un ciel d'orage par un soir de novembre
Je me suis longtemps demandé pourquoi Georges Brassens n'avait pas plutôt fait référence à Septembre dans sa chanson « L'orage. »
« ...il me tomba d'un ciel d'orage par un soir de novembre, à cheval sur les toits
un vrai tonnerre de Brest avec des cris de putois allumait ses feux d'artifices... »
Tout le monde sait que les orages de fin août et septembre sont en France nettement plus beaux et spectaculaires que ceux de novembre : pour équilibrer le nombre de pieds collant à la mélodie ça n'aurait rien changé... alors pourquoi? Une simple étourderie ? Une histoire rare mais vraie ? L'artiste avait-il une âme de globe-trotter ?
Que ce soit au Bas-Congo ou au sud Cameroun, octobre et surtout novembre, sont les mois de fin de la grande saison des pluies et il y a alors de magnifiques orages. La nuit quand le ciel est zébré d'une multitude d'éclairs, dont certains ne tombent pas très loin, c'est un spectacle extraordinaire à rendre banal le plus coûteux des feux d'artifice de 14 juillet ou celui d'une cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques... nom de Zeus.
Parmi mes souvenirs les plus anciens il y en a un très fort c'est le mariage de mon oncle Didi et de ma tante Josiane. C'était, le 17 novembre 1951 : j'avais donc cinq ans.
Je suis content de conserver intact dans ma mémoire des bribes de cet évènement car la camarde n'a guère été magnanime avec notre famille : de cette journée il n'y a plus aujourd'hui dans notre famille que mon cher Didi, bientôt 83 ans, mon frère Serge et moi à répondre encore présent.
Ce mariage fut somptueux, toutes les femmes étaient en robe longue, les hommes sur leur 31.... La guerre était finie depuis 5 ans... un besoin de vivre en affichant une certaine opulence.
Je suis heureux d'avoir retrouvé ces anciennes photos où je revois mon arrière grand-mère Marie Mathilde Jeanne qui approchait les 90 ans et son inséparable gouvernante Emilienne et sa fille aînée Madeleine, mes grands-parents Marcel et Geneviève, mes parents jeunes d'autant que Roger mon père n'a guère eu le temps de vieillir.
Le temps passe trop vite pour ceux qui n'ont jamais besoin de chercher quelque chose à faire pour passer le temps.....
J'ai en mémoire les premiers bétonnages du barrage d'Inga 2 au Zaïre : ce fut le jeudi 12 novembre 1973 et il était près de 22 H et sous une pluie d'orage africain délavant ces bétons dits de propreté .....Le directeur des travaux, un italien superstitieux, avait poussés les équipes à finir le curage des fonds de fouille et de poser les coffrages pour que ces premiers bétons soient coulés avant minuit.... impérativement avant le vendredi 13... et il est clair que si les ouvriers n'y étaient pas arrivés ces premiers coulages auraient été reportés de plus de 24 heures..... au samedi 14.
En novembre 1976 l'histoire recommençait avec encore des pluies diluviennes alors qu' on voulait réaliser les planches d'essais du barrage de Sidi Chéo dans la province d'El Borouj au Maroc. Selon les habitants d'un douar proche il n'avait pas plu comme ça depuis 20 ans..... Un saint homme inhumé sur le site ne devait pas voir tout ce ramdam d'un bon œil.... mais l'ouvrage fut rapidement rebaptisé Al Massira et il n'y eut plus alors le moindre problème.... D'autant que le déluge eut aussi la bonne idée de s'arrêter.
Novembre 1985 à Yaoundé : L'ADFE recevait Guy Penne le conseiller de François Mitterrand pour les affaires africaines, de passage au Cameroun. Curieux personnage, fort agréable qui nous susurrait, à nous militants de base, quelques vraies fausses (ou le contraire) confidences dont on se demandait si c'était du lard ou du cochon. Cet homme, ancien dentiste de Mitterrand, reconvertit dans la diplomatie secrète illustrait en l'inversant la maxime de Raymond Devos : « Comment reconnaît-on un doute ? A son ombre » avec lui c'était plutôt : « Comment reconnaît-on un homme de l'ombre ? A nos doutes ».... Et pourtant il y a quelqu'un contre lequel il avait probablement une dent c'était l'ancien ministre Nucci. Lors d'une autre venue, au printemps 1986, il nous avait laissé entendre qu'il allait y avoir de sérieux problèmes dans une affaire qui se nommait le Carrefour du Développement et dont les journaux allaient bientôt parler.... Quand j'y pense avec le recul c'était un sacré un scoop.... on peut d'ailleurs lire ce qu'en pense, de façon plus feutrée, Guy Penne dans « Mémoires Africaines » qu'il a écrit en 1999.
Toujours en novembre 1985 nous avons fait connaissance avec l'hôpital de Yaoundé. Pierre notre gentil boy était arrivé, affolé, très tôt le matin, en nous disant que son bébé avait été hospitalisé avec une forte fièvre. En Afrique il n'y avait guère de sécurité sociale et les médicaments, que les hôpitaux ne fournissaient pas, étaient hors de prix pour la population ; même pour les boys qui sont parmi les travailleurs les plus aisés. Nous nous sommes mis immédiatement en quête d'une pharmacie avec l'ordonnance pour ramener le plus tôt possible ces médicaments aux médecins. L'enfant guérit et quelques jours plus tard il rentrait chez lui.... Mais je n'oublierai jamais la réalité sordide de cet hôpital et l'angoisse de Pierre et les larmes de sa jeune femme.
De retour en France, novembre fut le mois des rituels, rituels professionnels, rituels politiques mais avant de finir ce billet avec ces ritournelles je veux rappeler un évènement important :
Pour la Toussaint maman se rendait chaque année, depuis 1962, sur la tombe de mon père à Tarascon, un voyage coûteux et fatigant d'autant que les derniers amis qu'elle connaissait avaient pris leur retraite et avaient quitté cette ville. En 1990 nous avons décidé, en conseil de famille de rapatrier le cercueil de papa à Villiers sur Marne. Ce fut un choc pour notre famille de voir descendre de la voiture funéraire un petit cercueil de 50 cm de long. Maman, que Simone sa sœur, Didi, Josiane, Pilou et moi entourions, a bien failli s'évanouir. Un très dur moment..... qui était cependant nécessaire pour que maman commence à tourner la page et envisage pouvoir faire d'autres voyages que le traditionnel pèlerinage de Tarascon. Raymonde a rejoint Roger il y a quelques semaines.
Il est maintenant temps de passer aux rituels de novembre :
Novembre fut durant ces 20 dernières années le mois de la préparation du budget d'entreprise de l'année suivante.... Du simple foutage de gueule, inutile dans le secteur privé. Des figures imposées pour pouvoir tenir en laisse les différents services et museler les salariés. Je me souviens notamment une présentation de budget au siège social en 2002 à une époque ou nous avions deux directeurs généraux (on ne prête qu'aux riches). Il y avait une telle mésentente entre les deux clowns qu'ils ont été à deux doigts de se foutre sur la gueule devant l'assemblée des responsables d'agence. Un grand moment ! Et on voudrait que les salariés aient le moral... ces deux clowns ne sont, bien évidemment, plus là .... Et on eut depuis le loisir d'en découvrir 3 ou 4 autres, mais jamais en duo... dont certains n'étaient d'ailleurs pas mauvais, il faut bien le reconnaître..... à suivre.
Le Beaujolais nouveau le 3ème jeudi du mois : un prétexte pour faire des réunions techniques. Heureusement qu'il y a souvent forces victuailles accompagnant le pinard qui est encore une tradition commerciale foutage de gueule.... Il y a pourtant tant de bons vins dans notre France.
Et puis le passage obligé par la politique, mais vite fait car j'en ai déjà trop parlé : Les congrès du PS, le débat pour le référendum sur le traité européen, et la désignation de notre candidat pour les présidentielles de 2007.
Je vais d'abord évoqué un excellent souvenir : La démission de B. Bellec de la présidence de la Communauté d'Agglomération Niortaise en novembre 2002, persuadé que le conseil de la CAN ne pouvait que le réinvestir avec les pleins pouvoir huit jours plus tard..... et bien 8 jours plus tard les conseillers ont élu président notre excellent ami Alain Mathieu, Maire d'Aiffres. Champagne !
En novembre 2004 il y eut le débat pour le référendum sur le projet de constitution européenne. J'avais bossé le texte et l'étais résolument contre. J'ai fait le tour des 20 sections du département pour inviter les socialistes à voter Non.
J'ai parfois dérapé, notamment quand un camarade maire dans le nord, du département avouait être intellectuellement hostile au texte mais déclarait qu'il voterait Oui pour éviter que le PS n'éclate : je l'ai traité de munichois et comme ses amis le soutenaient, je les ai traités de pétainistes. Mea culpa ; je n'ai pas toujours été très fin camarades !
Pour le débat fédéral j'ai usé de quelques relations pour faire venir Manuel Valls partisan du Non, alors que les Ouiistes et Ségo faisaient venir Julien Dray. Ils se sont « étripés » pendant 2 heures devant nous, chaque camps applaudissant son champion : 8 jours plus tard Valls changeait de camps pour éviter lui aussi l'éclatement du PS : j'avais tout faux... sauf pour ce qui concerne mon jugement du texte... Ah ! Non.
En novembre 2006 lors de la désignation de notre candidat pour les présidentielles je fus vraiment emmerdé... pour moi il était hors de question de choisir Strauss Kahn qui me paraissait sur le plan économique, et à l'instar de son pote Tony Blair, être encore plus libéral que Sarkozy. J'avais promis à Vincent de choisir Ségo malgré mes réticences.... et je n'avais pas confiance dans le gauchissement de Fabius.... Je sentais qu'il était temps pour moi de prendre quelques distances avec le parti.... et c'est justement ce que j'ai commencé à faire en déposant un bulletin qui sentait le....... Fa-go.
J'ai fait sensiblement de même cette année lors du congrès de Reims en choisissant d'abord la motion de Martine Aubry puis en votant ensuite pour Ségolène Royal comme secrétaire nationale.
Les sondeurs vont avoir du boulot avec des gens comme moi.... Je reprends d'ailleurs une tradition matriarcale puisque ma mère pour les élections présidentielles a toujours voté au 1er tour pour Arlette Laguiller qui ressemblait à une bonne copine de travail et pour le second tour au candidat de droite, par respect à la mémoire de mon père.
Je n'ai pas évoqué dans ces souvenirs en vrac de novembre certains sujets déjà traités sur ce blog.
Un souvenir triste comme la disparition de Luis en novembre 1981 ou un autre heureux comme la présence de presque tous mes amis pour mon jubilé le 26 novembre 2006..... à l'heure où Ségolène Royal était officiellement investie par le PS.
A suivre.