Ciné-cure........ Au nom du père...
Voilà un titre de film qui est en symbiose avec l’actualité ; j’aurai pu dire qu’il tombait pile poil, mais cette expression est maintenant « guignolesquement » chiraquienne, je ne peux dont plus l’utiliser dans un billet politique ciné-cure motivé, avant tout, par mon anti-sarkozisme primaire.
Eh oui ! Ils ont gagné hier dans la 12ème circonscription des Yvelines ! Ils auraient pu tenir profil bas car une participation de 33% ce n’est, après tout, pas très folichon mais n’empêche qu’aujourd’hui ils sont pendus à tous les micros, présents à toutes les télés pour célébrer la belle ( ?) victoire de leur candidat, grotesque umpiste mais sympathique people, lors d’une élection partielle dans un fief de droite, a priori imperdable,…… Putain quelle peur ils ont du avoir, ces nocs, pour maintenant bomber ainsi le torse ! Après cette victoire et avoir passé un coup de fil de félicitations et de récupération, on peut penser que le président a pu enfin, après ces terribles semaines de turbulences médiatiques, tomber, douillettement, dans les bras de Morphée. Bonne nuit les petits......
Pendant ce temps les gens d'en bas, modestes citoyens, contribuables non protégés, les pauvres, les exclus, les chômeurs ou les travailleurs qui font ceinture blanche sous le harnais, et les générations du futur proche (en attendant les suivantes), peuvent continuer à cauchemarder !
Et si, pour changer de ton et éviter de trop m'attarder sur un non évènement, j'en revenais au titre en parlant un peu cinoche.
« Au nom du père » est un excellent film réalisé par Jim Sheridan, qui est sorti en salle en 1993 et qui raconte l’histoire des « quatre de Guilford », quatre jeunes voyous qui ont été accusés de participation à des attentats de l’IRA et furent condamnés suite à des aveux obtenus sous la torture, et qui en application des lois anti-terroristes du gouvernement Thatcher, écopèrent en 1975 de 15 ans en prison.
Les familles des jeunes gens furent aussi arrêtées dont les «sept Maguire», la famille de Gerry Colon, qui durent aussi subir des peines de 12 à 15 ans de prison.
En 1989 une enquête montrait que les preuves étaient fausses, les notes des interrogatoires falsifiées, et les jeunes gens fallacieusement accusés. Un nouveau procès permis leur libération alors qu'ils étaient sur le point d'avoir purgé leur peine et en 2005 Tony Blair présentait publiquement des excuses.... ce qui leur fit une belle jambe notamment au père de Gerry qui était mort en prison
C’’est un film militant que réalisa l’irlandais Jim Sheridan, un pamphlet contre l’injustice, contre des méthodes policières ; mais c'est aussi un témoignage sur l’univers carcéral et une belle histoire d'amour racontant les retrouvailles d'un père et d'un fils réunis par l'injustice dans une même cellule. Le film est splendide : tout y est, le rythme, l’émotion, la réflexion… et puis les acteurs sont magnifiques comme portés par la cause avec Daniel Day-Lewis dans le rôle de Gerry Conlon et Pete Postlewhwalte dans celui du père Giuseppe, ou encore Emma Thompson.
J’ai retrouvé une interview de Daniel Day-Lewis par un journaliste de Studio qui lui demandait comment il qualifiait sa relation de travail avec Jim Sheridan :
« Indéfinissable ! Il faut dire que c’est un grand fou. J’aime son extrémisme et j’y suis réceptif. On se pousse l’un l’autre vers les extrêmes sans qu’on ait besoin de beaucoup parler. D’ailleurs, on se comprend si bien qu’on peut se dispenser de tout un bavardage inutile autour du film, du personnage, du rôle. Chacun a un grand respect mutuel de l’intimité de l’autre et, en même temps, le sentiment de partager un secret… »
« Au nom du père » reçu l’Ours d’or à Berlin et eut 7 nomination aux oscars.
Le tandem Sheridan/ Day-Lewis tourna deux autres films :
Il y avait eu en 1989 « My Left Foot » qui raconte l’histoire du peintre irlandais Christy Brown qui était handicapé, atteint d’une paralysie spasmodique. A l’âge de 9 ans il arriva à contrôler son pied gauche et commença ainsi à se mettre à peindre devenant par son travail un peintre reconnu. Pour jouer ce rôle Daniel Day-Lewis, perfectionniste, passa plusieurs semaines en fauteuil roulant et s’est fait nourrir à la petite cuillère. Il obtint l’Oscar du meilleur acteur.
Il y eut ensuite en 1998 «The Boxer» qui évoque la vie du boxeur irlandais Barry McGuigan, un champion du début des années 80 qui connut ensuite la prison. Les personnages décrits dans ce film ont eu une période de gloire et Shéridan raconte ce qui se passe après, quand ils ne sont plus sous les lumières, quand ils ne sont plus des vedettes, quand il n’y a plus ni amour ni amitié et qu’il faut, malgré tout, reconstruire une vie. (Ce film m'a touché car il m'a rappelé un boxeur que j'ai connu à la fin des années 60 et qui avait été champion d'Europe avant de connaitre ensuite des jours difficiles.)
L’émotion qui se dégage du film vient de la contradiction qu’il y a entre ce que l’on voulait être et ce que l'on devient. Un film sur les craintes et les espoirs magnifiquement traduits par Daniel Day-Lewis et Emily Watson. Dans le cadre de sa préparation du film Day-Lewis s’est beaucoup entraîné et s'est fait coaché par l’ancien champion McGuigan. Il fut nommé pour les « golden globes ».
L’Irlandais Jim Sheridan a fait une belle carrière de réalisateur, avec seulement 6 films. Dans ces films , du moins ceux que j'ai vu, on est impressionné par la densité humaine des personnages, la générosité des thèmes et des messages des films et par la rigueur professionnelle du réalisateur ; des qualités reconnus qui en ont fait un grand cinéaste populaire. Je n’ai pas vu tous ses films : on dit beaucoup de bien d’un film de 1990 qui n’est pas sorti en France, « The Field » avec Richard Harris, Tom Béranger et John Hurt.
Par contre je suis quelque peu resté sur ma faim avec « In América » sorti en 2004, et enfin son dernier film en 2006 fut complètement éreinté par la critique. Shéridan n’est pas très vieux (il a juste 60 ans) mais il semblerait que la cause irlandaise le transcendait et que Daniel Day-Lewis magnifiait ses films. Sera-t-il capable de revenir au premier plan sans ces éléments moteurs?
Day-Lewis n’a pas tourné autant de film que d’autres acteurs de sa trempe (Comme De Niro par exemple car il a voulu devenir acteur en voyant Taxi driver ), puisqu’il n’a, à son actif, que 18 films……. Mais peu de "non succès".
Au début des années 80 il apparût en rôles secondaires dans quelques grands films comme «Gandhi» d’Attenborough, « Le Bounty » de Donaldson, « My Beautiful Laundrette » de Frears et « Chambre avec vue » de James Ivory.
Il tient son premier rôle principal en 1988 dans « L’insoutenable légèreté de l’être » de Philip Kaufman face à Juliette Binoche.
Ensuite ce furent les trois films de Shéridan avec en plus et en alternance :
En 1992 « Le dernier des Mohicans » de Michael Mann (déjà cité dans le précédent billet ciné-cure)
En 1993 « Le temps de l’innocence » de Martin Scorsese avec Michel Pfeiffer.
En 2003 « Gangs of New York » de Martin Scorsese face à Léonardo Di Caprio
En 2008 « There will Be Blood » de Paul Thomas Anderson avec le deuxième Oscar de meilleur acteur pour Day-Lewis à 51 ans.
Selon Studio de mars 2008 « … Pour les partenaire de Daniel Day-Lewis mieux vaut qu’il incarne un homme sympathique, car l’acteur est connu pour entrer dans la peau des personnage et s’y tenir tout au long du tournage, même en dehors des prises… »
Jim Sheridan disait « Il émane de lui une sorte de présence spirituelle. Il est taillé pour jouer les saints ou les diables… »
Quelques films ne sont pas sortis en France et parmi ceux que j'ai pus voir, un seul fut vraiment rejeté par la critique française, à juste titre me semble t-il, « La Chasse aux sorcières » de Nicolas Hytner en 1996 (C’était un remake « Des Sorcières de Salem » avec Signoret et Montand)
Daniel Day Lewis serait en train de tourner un nouveau film avec Scorsese « Silence » qui devrait sortir en 2010.
Le film « Au nom du père » montre comment dans un pays démocratique comme l'Angleterre, au nom de bons sentiments, la lutte contre le terrorisme, des institutions saines pouvaient cautionner des dérives fascisantes ; Nul n'est à l'abri et on ne voit pas ça que dans des républiques bananières. L'Irak, Guantanamo sont la preuve que ça peut toucher au 21ème siècle la république à bannière étoilée comme les Etats-Unis.... mais c'était sous Georges Bush junior... l'exemple est, sans doute, mal choisi car c'était déjà au nom du père, avec la suite de l'aventure irakienne.
En Afrique on note des progrès certains : après les coups d'état de la période post indépendance faits par des sergents quasiment illettrés (il en reste encore comme Camara en Guinée) on a tendance à passer au niveau supérieur avec des transmissions de présidence par filiation : Kabila fils après Kabila père, Bongo fils après Bongo père, Eyadéma fils après Eyadéma père... on évoque même de possibles successions chez les Wade, chez les Moubarak, chez les Kadhafi, peut-être même chez les Biya.... mais sans doute ne sont-ce là que des rumeurs.
En France il n'y a rien à craindre : le président cherche tout juste à placer son fils à la tête d'un EHPAD ; il n'y a pas de quoi s'affoler de ce très léger abus de pouvoir. Quel fils d'un président n'aurait, pour unique et modeste ambition, que de diriger une maison de retraite fut-elle médicalisée ?
Pour le président c'est probablement pour s'assurer une retraite tranquille et c'est la moindre des choses quand on est un dirigeant super actif .
Peut-être est-il aussi quelque peu inquiet d'entendre ses anciens discours dont il ne se souvient plus trop bien et où il disait des choses comme « travailler plus pour gagner plus » ou « il faut réduire le déficit public et la dette de la France » ou encore « il faut refonder et moraliser le capitalisme » etc, etc.... j'en passe et des meilleurs.
Une bonne place protégée pour l'avenir, à plus ou moins court terme, me paraît être, finalement, une sage précaution.... pour tout un chacun.
A suivre