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Souvenirs en vrac.... Notre vie est un livre qui s'écrit tout seul.

28 Janvier 2010 , Rédigé par daniel Publié dans #Souvenirs en vrac

 Le titre est tiré d’une citation de Julien Green : « Notre vie est un livre qui s’écrit tout seul. Nous sommes des personnages de roman qui ne comprennent pas toujours ce que veut l’auteur ».

 J'aime lire, j'aime passionnément les livres; je pourrais passer des heures dans une librairie ou dans une bibliothèque..... Des livres qui vont me servir de fil conducteur pour écrire ce billet, et pour faire remonter à la surface de ma mémoire quelques souvenirs, quelques anecdotes…

 

  On entasse, on entasse…. Il arrive un jour ou il faut faire du rangement par le vide. Je déteste jeter un livre que j’ai lu, aimé et conservé…ou alors, si je me suis planté et qu'il ne m'intéresse pas du tout, ce qui arrive rarement,  je m'en débarrasse immédiatement parfois même sans l’avoir fini…. Ceux qui sont rangés, bien au chaud, dans ma bibliothèque ont été jugés aptes à être gardés et donc à relire… un jour quand je serai vieux…. mais là aussi ça commence à coincer… On avance, on avance…..

 J’estime avoir plus de 1200 bouquins sur mes étagères (peut-être 1500 en comptant les revues « techniques » et « guides touristiques »), plus de 500000 pages. A raison de 2 bouquins par semaine et sans acheter et lire de nouveaux livres …..il me faudrait une bonne douzaine d’années pour tout relire. Est-ce raisonnable ? Non ! L’opération vide bibliothèque peut commencer….

  Je ne jetterai certainement pas les biographies, ni les livres d’histoire, ni les bons romans (surtout pas les classiques), ni les polars (du moins pas tous…). Les premières victimes seront donc les essais, les livres politiques qui sont vite obsolètes et ça devrait déjà en faire pas mal…..  

 Et puis il y a les hésitations pour des livres qui sont attachés à des souvenirs, à une histoire, ou à des cadeaux…

  Par exemple j’ai un attachement nostalgique pour les deux « Verne (s )» de mon enfance….. Jules Verne et Henri Vernes. Il me semble que le premier livre qui m’ait vraiment marqué, fut « L’Île mystérieuse » en bibliothèque verte : je devais avoir 9 ou 10 ans et j’étais malade et contagieux (la scarlatine) et mes parents m’avait séparé de mon frère et installé dans une chambre où il y avait un lit à cosy plein de  livres (essentiellement des romans de Dumas, Hugo et Verne) et, d’un naturel ambitieux, je m’étais jeté sur le plus volumineux, celui qui était en trois volumes….. Ça reste un grand souvenir, la passion de la lecture m’avait pris …  surtout lorsqu’au troisième livre je vis apparaître le capitaine Nemo…. Nemo que j’avais vu disparaitre quelques semaines plus tôt à la fin du film « 20 000 lieues sous les mers » et que j’ai lu ensuite comme la plupart des livres de Jules Verne. J’ai d’ailleurs du lire tous les bouquins du cosy entre 9 ans et 12 ans. … je n’ai pas conservé la bibliothèque verte de mes parents mais j’ai bien évidemment racheté la compilation de ces romans merveilleux…. Et ceux-là je les conserve :

 L’autre Vernes, le belge, celui avec un « s », fut mon auteur de pensionnat… au lycée de Foix de la 5ème à la 3ème. C’était facile à lire pendant la dernière heure d’étude celle avant le souper, celle ou les lectures autres que leçons et devoirs, étaient autorisées. Je savais tout de Bob Morane, Bill Balantine et l’Ombre Jaune du moins de « La vallée infernale » et sur « la piste de Fawcett » jusqu’aux « dents du tigre » et « Les sosies de l’Ombre Jaune ». J’ai racheté quelques uns de ces livres lorsque Didier eut une douzaine d’années pour l’intéresser à la lecture…. Ils sont là et je ne suis pas certain qu’ils aient eu beaucoup de succès. Je crois que je vais encore les garder une paire d’années pour voir s’ils peuvent intéresser Hugo le plus âgé de mes petits-fils.

  C’est lors de ma période montpelliéraine entre 15 et 17 ans que j’ai commencé à être vraiment roman-ivore : Hemingway, Steinbeck, Bromfield, Wright, Kessel, Monfreid, Boule, Hougron  et avec la particularité de lire les auteurs dans la continuité : quand un auteur me plaisait, je le lisais en série… y compris les «San Antonio». Il fallait qu’au moins deux de suite me déplaisent pour que j’abandonne la série…. Je continue toujours de la même manière, et ainsi ce fut ensuite Zola avec la série des « Rougon-Maquart » puis  Pearl Buck et ses romans en Chine dont «La mère» inoubliable…. tous ces livres sont encore là et resteront encore quelques temps.

 En classes terminales, même en section technique, on était tenu d'aborder les auteurs classiques ; pour certains comme Maupassant ce fut avec plaisir pour d'autres au contraire ce fut une contrainte ....  ainsi je n'ai jamais bien compris qu'on ait pu faire de Flaubert une référence alors qu'il n'a jamais pondu que quatre livres dont au moins deux,  que j'ai trouvé  inintéressants, rébarbatifs...

 Vers mes vingt ans ce furent mes premières incursions dans la science fiction et le fantastique : Dick, Asimov, Farmer, Bradbury, Clark, Simak, Van Vogt, Vance….: J’ai bouffé de la S.F romanesque pendant au moins de 3 ou 4 ans….. à longueur de transports en bus, métro ou train....  avant de réaliser que beaucoup de ces romans avaient des tendances fascisantes….. Entre temps, j'avais commencé à m'éveiller à la chose politique… mai et juin 68 étaient passés par là (juin 68 notre mariage)….. aussi ces bouquins furent-ils, pour la plupart, éliminés ; quelques rescapés vont bientôt connaître le même sort.

 Par la suite j’ai continué à lire : goulûment pendant les périodes africaines, plus sobrement lors des périodes françaises… Je fus plus sélectif dans mes choix …. Avec quelques erreurs, dont l’une fut de refuser très longtemps de lire des polars que je n’ai abordés que vers la cinquantaine…. et en découvrant que contrairement à la science-fiction, les polars ont généralement un vrai fondement social et les auteurs une orientation de gauche. (Voir « C'est du polar ou du ronchon » un billet d'avril 2008)

 Fin 1968, jeune marié et voulant sans doute montrer que je n’étais pas macho, dans le cadre d’une vente sur le lieu de travail, je me suis fait probablement embobiner par une charmante vendeuse, et j’ai passé commande pour 2 ouvrages, traitant de la condition féminine. Je me rappelle que le coût était prohibitif en rapport de mon salaire (Quelque chose comme 150 F au regard d’un salaire de l’ordre de 800 F) et je me suis fait copieusement engueuler en rentrant à la maison. Ces deux livres sont toujours là comme pour me rappeler mon erreur…. J’ai voulu les jeter il y a peu…. mais Pilou tient à ce qu’on les conserve encore un peu…. Je n’ai peut-être pas fini d’expier….

  Octobre 1969 : j’ai déjà raconté cette anecdote dans un billet d’août 2007 intitulé «Saga Guyanaise.. L’effet papillon ». Dans le cadre d’une reconnaissance géotechnique nous avions trouvé, par le plus pur des hasards, le bagne des annamites dont personne, alors, ne parlait. La mission terminée et rentrant métropole j’achetai le livre d’Henri Charrière « Papillon » où ce bagne fait l’objet d’un chapitre avec une parfaite description. Ce livre là ne sera jamais jeté.

  Rentré de Guyane, au début des années 1970 je poursuivais ma formation politico-culturelle. A Marseille en mai 1970, un copain-collègue Robert m'entraina à une réunion du Mouvement de la paix ; je fus intéressé, et comme nous en débattions il me donna un livre très très sérieux : « Initiation à la théorie économique marxiste » d'Ernest Mandel...  Cela m'a fait beaucoup de bien car j'ai alors compris que si j'étais de gauche..... je n'étais sûrement ni communiste ni trotskiste.... J'ai revu Robert il y a 2 ou 3 ans.... je crois qu'aujourd'hui, il est lui aussi, assez loin de ça.

 L'expérience guyanaise me conduisit à acheter «Tristes tropiques » de Claude Levy-Strauss... voilà quelqu'un  qui me convenait nettement mieux que Mandel même si je fus déconcerté et déçu par sa phrase  «Je n'aime pas les voyages et je n'aime pas les explorateurs »....Moi qui ne rêvais que de voyages et d'explorations.
 Le Mandel a quitté ma bibliothèque il y a fort longtemps comme une autre curiosité momentanée, le « Défi américain » de Servan Schreiber.... par contre le livre de Lévy Strauss est toujours là... un peu poussiéreux.  Est-il encore utile de le conser
ver ?

 9782266091077[1]
 En 1973 je rejoignais le Zaïre pour le chantier du Barrage d’Inga 2, détaché dans l’équipe de maîtrise d’œuvre piloté par l’EDF. A Kinshasa j’avais des collègues au laboratoire de génie civil dont François Xavier avec qui j’avais travaillé à Paris quelques années plus tôt. Je savais que nous avions des convergences politiques ; il avait quelque peu évolué et ne se disait plus de gauche mais écologiste et dès notre première rencontre, chez lui, il a cherché à « m’instruire » en me prêtant un livre « l’Utopie ou la mort » d’un certain René Dumont dont les français allaient faire connaissance un an plus tard lors des élections présidentielles qui suivirent le décès du président Pompidou. Cette découverte fut importante pour moi, et je me suis procuré ensuite tous les livres de l’agronome de la faim, le père de l’écologie.  La plupart de ses livres prophétiques qui ont permis une prise de conscience ont malgré tout quelque peu vieillis et...... si je peux maintenant me débarrasser de quelques uns… j'en garderai toujours un ou deux par respect pour ce grand monsieur et notamment « Démocratie pour l'Afrique » qu'il m' avait dédicacé en 1992.

  En 1975 une équipe de géophysiciens est venue à Inga pour une mission de reconnaissance d’un nouveau projet de barrage. Nous avons accueilli lors d’une soirée conviviale ces nouveaux arrivants…. Il se trouve que j’ai sympathisé avec Serge L. et que nous avons parlé cinéma… évoquant le film de Werner Herzog « Aguirre la colère de Dieu » que j’avais vu quelques mois plus tôt lors de nos vacances en France, Serge me dit qu’il avait justement acheté, avant de partir, « Le rêve doré, les Conquistadors »  de Walker Chapman et qu’il allait me le prêter dès qu’il l’aurait fini. En fait il me l’a offert avec une petite et sympathique dédicace. Encore un bouquin qui ne quittera pas ma bibliothèque.

 Toujours au Zaïre et toujours en 1975. J’ai déjà raconté comment je n’ai pas été dupe de l’identité d’Emile Ajar, l'auteur de « La vie devant soi ». J’ai raconté cette anecdote dans un billet de mai 2009 « C’est un grand tort d’avoir toujours raison ». Il faut dire que je venais de faire une sérieuse cure de  Romain Gary lisant presque en continu l’ensemble de son œuvre, y compris des livres parus sous des pseudos.

 Et pour en finir avec la période zaïroise, j’ai le souvenir d’un match de football courant juin, une équipe de zaïrois du site contre l’équipe des européens, match au cours duquel je me suis fait une méga-entorse qui m’a pratiquement empêché de marcher et de travailler pendant plus d’un mois….. alors que je venais d’accompagner, à l'aéroport de Kinshasa, Pilou et les enfants qui rentraient en France et qu’il me restait, à peine, un peu plus d’un mois à effectuer avant de rentrer à mon tour définitivement. Ce fut ma période russe et je n’ai pas lésiné: entre les 850 pages de « Crime et châtiment » et les 1000 pages des « Frères Karamazov » pour Dostoievski et les 1400 pages de « Guerre et Paix » et les 1040 pages d’« Anna Karénine » j’ai meublé comme j’ai pu ces longues semaines sans famille, sans chantier, sans télévision et sans radio… quelques copains venaient me voir et les techniciens de mon service. Il est peu probable que je me replonge un jour dans ces sagas russes….

  Je n’ai pas de souvenir, d’anecdote particulière pour la période marocaine…. Sinon le plaisir de partager des livres avec des copains marocains…. Je pense notamment à Choukri qui était féru d’Histoire de France et qui, chaque fois qu’il venait me voir sur le barrage d’Al Massira, se servait dans ma réserve de livres… Je me souviens qu’il avait aimé « Les hommes de la liberté » de Claude Manceron. Mais j’en ai déjà parlé en février 2009 dans le billet « Kaifa assbaho asdikai ».... en échange Choukri me fit découvrir Naguib Mahfouz en me prêtant « Passage des miracles »....Mahfouz que j'ai continué à suivre ensuite notamment avec sa trilogie du Caire. 

  La période suivante 1979/1982 est celle où, rentré en France, j’ai commencé à acheter beaucoup (trop ?) de livres politiques ou essais divers. Là j’ai vraiment du ménage à faire….tous peuvent partir sauf peut-être « Ici et Maintenant » qui préparait la victoire de François Mitterrand du 10 mai 1981, Mitterrand que nous étions allés applaudir à une fête de la rose à Wittenheim.

 Je pourrai aussi conserver « J’ai mal à peau de gaulliste » où  Alexandre Sanguinetti annonçait et critiquait la dérive libérale de la droite française.

 C’est aussi à cette époque que j’ai découvert avec retard Alexandre Soljenitsyne  dont un très beau petit livre « Une journée d’Ivan Dénissovitch » puis le monumental «Archipel du Goulag ». Des livres que je ne jetterai jamais pas plus que la passionnante « Histoire intérieur du parti communiste » en trois volumes de Philippe Robrieux. 

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De ces débuts de la décennie 80 si j’avais un seul roman à retenir ça serait « Fort Saganne » de Louis Gardel ; je restais émerveillé devant les exploits des bâtisseurs d’Empire, et je n’avais qu’un envie : retourner rapidement en Afrique...... 
 Un court retour en Afrique dès janvier 1982, court mais tellement long... c'était la première fois que je partais seul, car la mission n'était que de deux mois et quelques jours ou semaines.... c'était en brousse en Guinée de Sékou Touré ; la Guinée qui était (et est toujours) une des nations les plus pauvres d'Afrique. Je téléphonais à ma famille en France un jour par semaine.... on avait retenu le mercredi pour être certain d'avoir une présence à la maison. D'un poste de brousse j'attendais de longues heures, parfois toute une journée, pour arriver à joindre Conakry puis ensuite la France. Heureusement que j'avais emmené des livres : les tomes 9,10 et 11 de « La nouvelle Histoire de la France contemporaine » ;   tomes qui couvrent la période 1848/1914.... ils m'ont aidé à passer le temps  
 Quand je suis rentré je n'ai pas retrouvé ces livres dans ma valise : Je n'avais pas voulu donner un bakchich aux douaniers à l'aéroport guinéen pour qu'ils évitent d'ouvrir ma valise..... je l'ai ouverte moi même pour montrer que je n'avais rien à cacher.... puis refermer. Ce n'était pas ce qu'ils attendaient : résultat à l'arrivée à Marignane elle était éventrée et certaines choses, dont les livres, manquaient... ils avaient laissé le linge sale qui débordait de la valise sur le tapis des bagages.....  

 

(A suivre)

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