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Philo bath…. Philosophes de la Grèce antique (6): Epicuriens et Stoïciens.

15 Septembre 2015 , Rédigé par niduab Publié dans #Philo bath

C’est bientôt la fin de l’été et je dois mettre un terme à mes devoirs de vacances consacrés aux philosophes de la Grèce Antique. Comme pour les précédents billets j’ai abondamment emprunté au livre de Papadogeorgos  Georgos « Hommes illustres de la Grèce Antique », complétées par quelques éléments trouvés sur Internet et notamment chez Diogène Laerce.

Dans le précédent billet j’ai évoqué les écoles qui furent créées au 4ème siècle av. J-C, l’‘'Académie’’ de Platon et le ‘'Lycée’’ d’Aristote et Théophraste puis le courant des ‘'Cyniques’’. Au 3ème siècle av. J-C deux nouveaux enseignements philosophiques apparurent : le premier, l’école du jardin, fondé en 306 av.J-C par Epicure, le second, l’école du Portique, crée  par Zénon de Cition en 301 av. J-C.

« Epicure de Samos (341-270 av..J-C). C’est grâce à sa théorie selon laquelle la physique détermine les phénomènes  naturels, et non les dieux, qu’il libéra l’homme de la crainte du dieu-justicier. Pour  Epicure le bien suprême est le bonheur, car toutes les créatures vivantes recherchent le plaisir et tentent d’éviter la tristesse. Sa phrase concernant la mort est restée : Il décrétait que la mort ne nous concerne pas puisque tant que nous sommes en vie, elle n’existe pas et quand elle survient, on n’existe plus….. »

Il se caractérisait par ses qualités morales et il accordait une très grande importance à l’amitié qui le liait à ses disciples. Il commença à enseigner à Mytillène en 311 av. J-C. Sa philosophie suscita alors l'hostilité (mais il y rencontra son disciple et futur successeur Hermarque) et il parti pour Lampsaque où il vécut de 310 à 306 av. J.-C. Il y fit ses premiers disciples qui le suivirent à Athènes quand il décida de s’y installer en 306 av. J.-C., à l’âge 35 ans et où il achèta un jardin. L’école du Jardin devint le centre des études épicuriennes. Il y passa le reste de sa vie. Tous ceux qui connurent Epicure, le caractérisait comme un homme doux, simple et bon.

C'est pendant cette dernière période qu'il écrivit un grand nombre de ses œuvres et de ses lettres ; il fut l'un de ceux qui ont le plus écrit dans l'Antiquité, plus de 300 volumes dont la quasi-totalité fut hélas perdue.

 « ….. Selon lui la religion se nourrit et prospère grâce à l’ignorance et elle plonge l‘homme dans l’ombre avec la crainte des ‘’espions célestes, c'est-à-dire les dieux. La morale épicurienne a un fondement matériel, en se basant sur la conception que le bien suprême est le plaisir. Mais le sage saura éviter les plaisirs trompeurs tels que les plaisirs du corps, tels que la nourriture, le sommeil etc… qui apportent des bonheurs fugaces. Le sage peut d’ailleurs limiter ces plaisirs au strict minimum. Les plaisirs de l’esprit sont en revanche plus durables ; ils ne se limitent pas au présent mais s’étendent au passé en tant que souvenirs et à l’avenir en tant qu’espoirs.

L’idéal d’Epicure consistait à vivre de manière discrète, au-delà de l’agitation sociale, au sein d’une amitié philosophique, afin d’atteindre une existence harmonieuse et sereine. Selon Philodème, philosophe épicurien, l’enseignement de l’école épicurienne peut se résumer ainsi : ‘' Dieu est sans crainte, la mort imprévisible, les biens matériels facilement obtenus et  les malheurs patiemment attendus.’’ »

Quelques citations d’Epicure : « Celui qui ne sait pas se contenter de peu ne sera jamais content de rien » « Les hommes sots sont sauvés de la peine par le temps, tandis que les hommes intelligents sont sauvés par la logique » « Vis ta vie avec discrétion sans apparat » « Il faut savoir philosopher et rire en même temps »

On est finalement assez loin de l’image d’hédonisme qui est aujourd’hui accrochée à la qualification épicurienne. En réalité la doctrine d’Epicure était très austère : La vie doit être guidée par des plaisirs simples, les plus minimalistes possibles. Le plus important semble être d’éviter au mieux les peines, les malheurs. On est très loin de la recherche effrénée de plaisirs. 

Voyons maintenant comment Diogène Laerce évoque la fin de vie d’Epicure et sa succession dans le mouvement épicurien.

« Au moment même de sa mort, Epicure écrivit à Idoménée la lettre suivante :

''C’est à l’heureux et dernier jour de ma vie que je t’écris cette lettre. Mes intestins et ma vessie me causent une souffrance inexprimable. Mais pour compenser toutes ces douleurs, je puise une grande joie dans le souvenir qui restera de mes ouvrages et de mes discours. Je vous demande, au nom de votre sympathie pour moi et pour ma philosophie, sympathie que vous m’avez témoignée dès votre jeunesse, de prendre soin des enfants de Métrodore.''

Voilà donc quel fut son testament.

Il eut de nombreux disciples, dont les plus célèbres furent Athénien, Timocrate et surtout Métrodore de Lampsaque, qui ne le quitta jamais depuis le jour où il s’attacha à lui.

Ce Métrodore était un homme en tout point excellent, au témoignage d’Épicure lui-même.... Timocrate aussi en témoigne : Il ne se laissait troubler ni par les malheurs, ni par la mort. On dit encore qu’il mourut sept ans avant Épicure, à l’âge de cinquante-trois ans. Épicure lui-même, dans le testament cité plus haut, preuve qu’il est bien mort avant lui, prescrit que l’on ait soin de ses enfants. Le frère de Métrodore, Timocrate, fut aussi un des familiers d’Épicure. Il y eut encore Polyène de Lampsaque homme modeste et auditeur zélé selon Philodème. Son successeur fut Hermarque de Mytilène. On peut encore citer Léontyas de Lampsaque et sa femme Thémista puis Colotès et Idoménée, originaires de Lampsaque. Ce furent là les plus célèbres avec Polystrate, le successeur d’Hermarque. Après celui-ci, les chefs de l’école furent successivement Denys et Basilide. Apollodore, surnommé le tyran du jardin, fut aussi célèbre et écrivit plus de quarante ouvrages. Puis vinrent les deux Ptolémée d’Alexandrie, le noir et le blanc, Zénon de Sidon qui fut auditeur d’Apollodore et écrivain très fécond, Démétrios, surnommé Lacon, Diogène de Tarse, qui fit un ouvrage sur certaines sectes que les Épicuriens appellent dédaigneusement sophistes. »

Pour résumer le récit de Diogène Laërce la direction de l’école des épicuriens (le Jardin) après le décès d’Épicure (270 av. J-C) et en raison de la disparition prématurée de Métrodore (277 av. J-C) le premier scholarque fut Hermarque de Mytilène et ce jusqu’à son décès (250 av. J-C). Les scolarques qui lui succédèrent furent respectivement Polystrate jusqu’en 219 av..J-C puis Dionysios de Lamptrée qui meurt en 205 av. J-C. puis Basilide  etc..  mais les épicuriens du II° siècle. av. J.-C. étaient de plus en plus évanescentes.

Epicure, Métrodore, Hermarque
Epicure, Métrodore, HermarqueEpicure, Métrodore, Hermarque

Epicure, Métrodore, Hermarque

« Zénon de Cition  (335-263 av.J-C). Fils d’un commerçant phénicien installé à Chypre Zénon montra dès sa jeunesse un goût pour la philosophie. Son père lui achèta, au cours de ses voyages, des traités socratiques. Il vint à Athènes en 312 av.J-C et devint l'élève de Crates de Thèbes  un cynique dont j’ai déjà parlé dans mon précédent billet. . Après avoir étudié différents systèmes philosophiques, vers l'âge de 40 ans (301 av. J.-C.), il fondait sa propre école et l’installait à Athènes sur le site du Portique (stoa en grec). Qui devint le nom de l’école stoïcienne .

Voici la présentation qu’en fit Diogène Laerce (extraits) :

« Zénon était originaire de Cittium, ville de l’île de Chypre, citadelle des Hellènes, mais possédée par des colons phéniciens. Il fut disciple de Crates, mais on dit encore qu’il fut élève de Xénocrate pendant dix ans. Quand il vint à Athènes, âgé de trente ans déjà, il s’installa près d’une librairie. Là il lut le deuxième livre des Mémorables de Xénophon, et en fut si charmé qu’il chercha où vivaient ses semblables. Par chance, Crates vint à passer, le libraire le lui montra du doigt et lui dit : « Suis cet homme. »

Dès lors, il alla écouter Crates, étant d’ailleurs lui-même fort disposé à philosopher, mais un peu trop timide encore pour s’habituer à l’impudence des Cyniques……Il devait finalement quitter la secte après en avoir fait partie pendant vingt ans…. Comme il aimer se promener au site du portique et y discourir pour purifier ce lieu des massacres où l'on avait, sous les Trente, tué plus de quatorze cents citoyens, de nombreux gens le suivaient pour l'écouter. Ainsi naquit le courant appelé stoïcien du mot stoé (le portique).

Zénon était très estimé des Athéniens, au point qu’ils lui remirent les clefs de leur ville, qu’ils l’honorèrent d’une couronne d’or et d’une statue de bronze. Ses concitoyens en firent autant, pensant que la statue de cet homme serait un bel ornement pour leur ville. Les gens de Cittium en firent autant. Antigone faisait aussi grand cas de lui, et quand il venait à Athènes, il allait souvent l’écouter et l’invitait à venir le voir….. »

Si l'on mesure le temps qui s'écoule entre cette fondation et les derniers stoïciens romains comme Marc Aurèle, on constate que l'école stoïcienne s'est maintenue pendant près de cinq siècles. Cette durée exceptionnelle explique les importantes variations de doctrines qu'ont connues les stoïciens, et qui conduisent à distinguer trois périodes dans l'histoire du Portique. Il y a tout d'abord le stoïcisme ancien ou archaïque, celui de la stoa poikilè (représenté par Zénon de Clition, puis par ses disciples Cléanthe d'Assos premier scolarque du Portique en 262 av. J-C, puis Chrysippe de Soles, deuxième scolarque en  232 av J.C.  Ce dernier fut le plus prolixe des trois (Zénon au contraire faisait l'éloge de la brièveté) en systématisant la doctrine stoïcienne et la mettant en forme dans de nombreux traités, au point d'avoir longtemps été considéré comme le véritable fondateur de l'école du Portique. Le troisième scolarque, à partir de 205 av. J-C, fut  Diogène de Babylone et Antipater de Tarse, quatrième scolarque en -150 av. J-C.

C’est sous la gouvernance d’Antipater de Tarse que la mue de l’école s’amorça avec la seconde période, celle du stoïcisme moyen avec des penseurs comme Antipater et son disciple Panétius de Rhodes cinquième scolarque en -129, puis Posidonios d'Apamée, sixième et dernier scolarque de l’école à partir de 110 av. J-C. C'est de cette période que date l'incorporation, à la doctrine stoïcienne, des éléments platoniciens, aristotéliciens, voire épicuriens. La sagesse cesse d'y être un idéal inatteignable : on peut devenir effectivement sage en accomplissant ses devoirs, qui sont le moyen de parvenir à la sagesse. En 97 av J-C Poséidonios quittait Athènes pour s’installer à Rhodes, tout en restant responsable de l’école stoïcienne. En 86 av. J-C il se rendit à Rome pour initier ses amis, admirateurs et élèves dont Pompée et Cicéron. Ceux-ci vinrent écouter à Rhodes ses leçons en 78 av. J-C. A partir de cette époque il y avait deux écoles stoïciennes celle de Rhodes et celle de Rome. A la mort de Poséidonios en 50 av.J-C il n’y avait plus qu’une école stoïcienne celle de Rome, nouvelle capitale culturelle, dont Cicéron devenait le scolarque tout en conservant le totre de septième scolarque, en hommage à ses prédécesseurs, mais c’était alors le stoïcisme nouveau, ou impérial.  

Le stoïcisme de la période helléniste a subi de profondes transformations (notamment avec Chrysippe de Soles et Posidonios d’Apamée). La base du stoïcisme est cependant restée immuable en s'appuyant sur la distinction centrale entre les choses qui dépendent de nous et sur lesquelles nous pouvons agir et les choses qui ne dépendent pas de nous et sur lesquelles nous n'avons aucune influence. Pour vivre heureux et libre, selon les stoïciens, il ne faut pas lutter en vain contre ce qui ne dépend pas de nous, mais au contraire l'accepter et nous abstenir des vices et passions qui nous y exposent.

Voyons maintenant selon Diogène Laerce les grandes lignes de la pensée stoïcienne :

« Les Stoïciens divisent la philosophie en trois branches : la physique, la morale, la logique. Ainsi font Zénon de Cittium dans son livre sur la Raison, Chrysippe dans son premier livre sur le même sujet, dans le premier chapitre de sa Physique, Apollodore et Syllos dans le premier chapitre de leur Introduction aux dogmes. Eudromos dans son Institution morale, Diogène de Babylonie, et Posidonius.

Pour la logique, quelques-uns la divisent en deux sciences : la rhétorique et la dialectique ; et d’autres y ajoutent une certaine espèce définie qui se rapporte aux règles et aux jugements, d’autres suppriment cette division. Ils pensent que ce n’est qu’un moyen de découvrir le vrai, c’est par elle qu’ils peuvent faire la différence entre le réel et l’imaginaire. Ils s’en servent encore pour reconnaître le vrai, car c’est par des notions que l’on connaît les choses.

La rhétorique est pour eux l’art de bien dire en discours bien exposés, et la dialectique est l’art de dire juste dans les dialogues ; c’est pourquoi ils la définissent aussi la science du vrai, du faux, et de ce qui n’est ni vrai ni faux. Ils divisent la rhétorique en trois parties : l’éloquence des assemblées, l’éloquence judiciaire, l’éloquence des panégyriques. Elle se subdivise en invention, élocution, disposition et action. Le discours, de son côté, comprend un exorde, une narration, une réfutation et une péroraison.

La dialectique se subdivise en deux parties, l’une concernant le signifié, l’autre le signifiant.  La première partie, qui traite du signifié, se subdivise elle aussi en chapitre sur les notions, les jugements permanents et absolus, les prédicats, les verbes actifs et passifs, les genres et les espèces et encore les concepts, les modes, les syllogismes et les sophismes sur les mots ou les choses, tels que les raisonnements faux ou spécieux ou négatifs, les sorites et les raisonnements tronqués ou ambigus ou tendancieux ou enveloppés, ou cornus, ou subtils ou captieux. La seconde partie de la dialectique concerne non plus le signifié, mais le signifiant. Elle traite du langage figuré, des parties du discours, du solécisme, du barbarisme, des fictions, des équivoques, de la mélodie, du chant, des définitions, des divisions et de la diction.

Passons à la morale. Les Stoïciens y font entrer l’étude de l’instinct, du bien et du mal, des passions, de la vertu, du souverain bien, du mérite, des actions, du devoir, de la persuasion, et de la dissuasion. Telle est du moins la division donnée par Chrysippe, Archédème, Zénon de Tarse, Apollodore, Diogène, Antipatros et Posidonius. Car Zénon de Cittium et Cléanthe, comme ils étaient plus anciens, en ont traité d’une façon plus simple, et l’ont divisée en théorique et pratique.»

 Voici quelques extraits tirés du livre de livre de Papadogeorgos  Georgos « Hommes illustres de la Grèce Antique » concernant Chrysippe de Soles et Posidonios d'Apamée ou de Rhodes.

« Chrysippe de Soles (281-205 av.J-C.) Il considérait que la perception du monde par nos sens est liée à la multiplicité et à la diversité infinie des différents corps. Il combattit avec détermination la notion de chance et il affirmait que l’absence de causes pour certains évènements était due à une causalité inaccessible à la connaissance humaine…. »

«Poseidonios d’Apamée ou de Rhodes  (135-50 av.J-C.). Esprit inquiet et scientifique Poseidonios s’intéressait à de nombreux domaines. Il voyagea en Egypte à Marseille, En Espagne, en Italie. En l’an 97, il s’installa définitivement à Rhodes ou il devint responsable de l’école stoïcienne…..

L’œuvre de Poseidonios était très riche. On mentionne plus de 24 ouvrages dont il serait l’auteur, dont le dernier ‘’Histoire après Polybe ‘’ qui se compose de 52 tomes…..Ses conceptions philosophiques se caractérisent par la volonté de réunir en un ensemble harmonieux toutes les vérités utiles des philosophies précédentes. Il peut ainsi être qualifié de stoïcien, d’Héraclitien, de présocratique, et de platonicien. La contribution de Poseidonios à l’étude de la nature fut majeure.  

 

(A suivre) 

Zénon de Cition, Chrysippe de Soles, Poseidonios d’Apamée ou de Rhodes
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