UNE HISTOIRE DE FAMILLE Chapitre 3 : 1957 LE PREMIER VOYAGE EN ESPAGNE ET SES CONSEQUENCES
1957 – LE VOYAGE EN ESPAGNE
Miguel, qui avait été condamné à mort par contumace par le régime franquiste, craignait pour sa vie et malgré son désir de revoir son pays n'envisageait pas d'y retourner, même en vacances, tant que le régime franquiste sévirait en Espagne. Mon père Luis qui souhaitait plus que tout revoir sa famille avait demandé et obtenu la naturalisation française en 1956. Toute la famille pouvait alors se rendre en Espagne, pour les vacances ….tous sauf a priori Miguel, mais le désir de revoir son pays fut plus fort et il tenta une demande de visa qu’il obtint….il fit ce premier voyage quelque peu inquiet, mais ce mois d’août 1957, se passa plutôt bien, heureux de revoir toute la famille et en évitant d’aborder les sujets du passé qui auraient certainement encore fâché, 20 ans après.
Avec le recul, je me dis que ce voyage avait dû être éreintant et très stressant surtout pour mon grand-père, faire ces milliers de kilomètres sur des routes chaotiques, très mal entretenues, avec peu de stations services et peu de garages. Il fallait éviter de rouler trop près des bas-côtés, car il y avait de nombreux nids de poule. Cela nous valut à plusieurs reprises la casse des amortisseurs et, par manque de pièces de rechange, il fallut les faire souder jusqu'à la prochaine casse.
Je vais retracer ici ce premier voyage sur la terre de mes ancêtres. Avec ma sœur Paqui, nous découvrions avec curiosité le pays de nos parents et faisions connaissance avec toute cette famille dont nous avions entendu parler durant notre petite enfance.
Je m’étais imaginé que de l’autre côté d’une frontière tout devenait totalement différent, quelle ne fut pas ma surprise de constater que tout était exactement pareil à l’exception de la langue. La suite du voyage me prouva que le changement de paysage et d’habitat viendrait plus tard.
Le programme de ce voyage consistait à effectuer des étapes nous permettant de visiter la famille de ma mère tout d’abord dans le pays basque près de Bilbao où elle avait des cousins du côté paternel, puis à Santander où séjournait la Tía Genoveva, sœur de sa mère, et sa fille Lolita, qui étaient venues nous rendre visite à Champigny quelques années plus tôt, ainsi que 2 cousins Joaquim et Saturnino qui vivaient à Maliaño, fils du frère de ma grand-mère dont je n’avais jamais entendu parler. Nous parcourûmes de nombreux petits villages où vivaient encore de nombreuses personnes de la famille de ma grand-mère Pilar (Bezana, Mortera, Liencres..)
L’étape suivante fut Villasarracino, village natal de mon grand-père Miguel, situé à 58 km au sud de Palencia. Là, changement radical de paysage, fini les prés verts et les forêts d’eucalyptus, mais une plaine écrasée de soleil et des maisons en adobe (sorte de briques en terre crue mélangée à de la paille). Ce village rural comptait un millier d’habitants dans les années 1900 vivant essentiellement de l’agriculture (production de blé, orge, seigle, pois chiche, un peu de vin de mauvaise qualité, quelques légumes et un peu de bétail). Petite anecdote, un après-midi nous jouions Paqui et moi avec les enfants du village à escalader un petit monticule quand un adulte vint nous sermonner, tous les autres enfants s’étant enfuis car il s’avérait que nous étions toutes seules à piétiner un tas de lentilles ou de pois chiche qui séchait au soleil, mais nous, petites citadines, ne le savions pas.
Nous continuâmes notre périple vers l’Andalousie et après avoir dépassé Madrid nous abordâmes « Los llanos de la Mancha », dont le paysage est dominé d'une part par de longues plaines et de l'autre par un alignement de montagnes et où la température au mois d’août était insupportable.
Nous arrivâmes enfin à Grenade, où nous attendaient ma grand-mère, Mama Frasquita et mes tantes, oncles, cousins et cousines.
Ce séjour de quelques jours à Grenade et surtout les suivants quelques années plus tard, a été pour moi synonyme de liberté, car mon père, toujours très strict, nous laissa nous promener à travers la ville avec cousins et cousines de notre âge ou un peu plus âgés.
Nous fîmes connaissance avec les sœurs de mon père, Rosa, Matilde, Emilia, Guillerma et Carmen et avec nos cousins dont un certain nombre étaient de notre âge. Nous logions chez Emilia et nous nous sommes rendus dans les villages où vivait le reste de la famille. (Chauchina, Romilla....)
Imaginez un peu l’effet que faisait notre arrivée en voiture en 1957 dans ces villages, c’était l’attroupement assuré. Il faut se rappeler que l’Espagne vivait sous le régime de Franco depuis 1939 et ne se développait pas au même rythme que d'autres pays d’Europe.
C’est un peu à contrecœur que nous quittâmes Grenade pour continuer vers Barcelone où nous fîmes halte pour voir un de mes cousins, Antonio, fils aîné de ma tante Matilde.
Nous continuâmes vers Toulouse pour un arrêt obligatoire de quelques jours chez mon oncle Rafaël puis retour vers Champigny.
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ET SES CONSEQUENCES INDIRECTES
Malheureusement sur la route du retour mon grand-père fit un malaise cardiaque. Arrivé à la maison il consulta un cardiologue et fut contraint d’arrêter toute activité, mon père continuant seul à tenir la cordonnerie qui, là où elle était située, n'était pas rentable sans la fabrication de chaussures, et il dût chercher un autre local mieux placé, qu'il trouva à Neuilly sur marne.
Pour occuper les journées de mon grand-père on acheta une télévision mais l'inactivité lui pesait trop et il décida de retourner vivre en Espagne. Il prit toutes les dispositions et quelques semaines plus tard il repartit s’installer à Santander.
Cela eut des conséquences non négligeables pour la famille car pour pouvoir s'installer en Espagne, et souhaitant s'acheter un appartement à Santander, mon grand-père avait besoin d'argent. Il proposa donc à mes parents de leur vendre la maison. Il les mettait dans une situation financière difficile mais avaient-ils le choix ? Je suppose que mon père dû vendre la voiture. Il se rendait à sa boutique en mobylette. Ma mère était enceinte de ma sœur Malou, à son grand désespoir, c'était le plus mauvais moment pour avoir un nouvel enfant. Elle dit à maintes reprises à Malou qu'elle n'était pas désirée.
Mon grand-père accueillit très mal la nouvelle : "quelle idée de faire un troisième enfant ! ". Il me semble qu'il était mal placé pour juger, lui qui en avait eu également trois, et puis c'était leur vie, mais comme d'habitude il ne pouvait s'empêcher de vouloir tout régenter.
En février mon père fit une crise d'appendicite et dut être opéré en urgence ce qui conduisit à la fermeture de la nouvelle boutique pendant quelque temps donc pas de clients, pas de rentrée d'argent.
J'ai de cette année 1958 un souvenir assez sombre, non pas que j'ai été malheureuse mais il régnait à la maison une ambiance pesante surtout quand mon grand-père revint au mois d'août.
Quelques jours avant l'accouchement, ma mère reçut un télégramme l'avisant du décès de mon grand-père le 1er septembre, à un peu moins de 59 ans, il était tombé dans la rue, foudroyé par une crise cardiaque.
Le 22 septembre, ma mère accouchait de son 3ème enfant c'était encore une fille, il n'y aurait donc pas de Luis, ce serait Marie-Louise (dite Malou). Son arrivée représenta, pour Paqui et pour moi une embellie dans ce climat délétère. Dès ce moment je me suis sentie investie du statut de grande soeur.
Avec 3 filles mon père espérait qu'il y en aurait au moins une qui ferait une formation de coiffeuse, qu'il pourrait ainsi ouvrir un salon de coiffure avec elle et retrouver son premier métier. Mais malheureusement aucune n'eut la vocation et il continua donc dans la cordonnerie.
Pendant le temps que ma mère passa à la maternité nous étions hébergées, Paqui et moi chez des amis de mes parents, réfugiés espagnols, la famille Martin, qui habitaient dans un château désaffecté occupé par plusieurs familles vers les bords de la marne.
J'en ai gardé de très bons souvenirs et à l'adolescence j'ai continué à garder des contacts avec la fille aînée de la famille, Olga, qui avait sensiblement mon âge. Nous passions nos dimanches ensemble, nous travaillions toutes les deux dans le même quartier de Paris et pour nous y rendre, nous faisions le trajet en train ensemble. C'est un peu grâce à elle que j'ai rencontré Daniel dans une surprise-party où nous nous étions rendues. Puis la vie nous a séparées. Moi, je me suis mariée avec Daniel et nous avons commencé à voyager puis Olga est partie vivre en Corse pour y fonder sa famille. Lors d'un de nos séjours en Corse en 2011, nous avons eu l'occasion de nous retrouver et passer un moment avec plaisir.
A la fin de cette année scolaire un spectacle est organisé par l'ensemble des enseignantes sur le thème de l'Odyssée d'Ulysse, chaque classe représentant un épisode de ce voyage, moi j'étais une suivante de Nausicaa et Paqui faisait partie du groupe sensé représenté la coque du bateau. Tout au long de l'année nous avions étudié en classe le texte d'Homère, c'était une bonne entrée en matière pour moi qui allait au collège à la rentrée suivante.
Pour ce spectacle mon père nous fabriqua à ma sœur et à moi une paire de "spartiates" et les enseignantes lui demandèrent s'il pouvait réaliser les "spartiates" des autres enfants. C'est ainsi qu'il chaussa bon nombre de ces petits acteurs en herbe.
En 1959, ma tante Geneviève et mes cousins sont venus passer quelques jours avec nous.
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L'HERITAGE
A la suite du décès de mon grand-père, il fallut procéder au partage de la succession entre ses 3 filles, d'une part la vente de l'appartement qu'il avait acheté à Santander et d'autre part le solde de la maison de Champigny (que mes parents n'avaient sûrement pas réglé en totalité). D'un commun accord il fut décidé que ma tante Pilar bénéficierait de sa part ainsi que de celle de ma mère sur l'appartement de Santander en échange de quoi elle ne demanderait pas sa part sur Champigny. Il fallut attendre la venue des canadiens pour mettre en application cet accord.
À Paris (France) et Montréal (Canada), respectivement, ce contrat est conclut entre,
D'une part, Mme Encarnacion Andrés Nieto, majeure et mariée à M. Luis Rozon, également majeur et résidant à Paris, demeurant à Champigny sur Marne, Seine, 48 boulevard de Stalingrad,
D'autre part, Mme Modesta Pilar Andrés Nieto, majeure, célibataire et résidant à Montréal, Avenue Alfred n° 11,327,
Toutes deux interviennent en leur propre nom, droit et représentation, et la première assistée de son mari, et à cet effet,
EXPOSENT
1° Que le père des deux parties contractantes, M. Miguel Andrés Sanchez, était propriétaire de la maison dans laquelle vit actuellement Mme Encarnacion Andrés Nieto, et cela de son vivant et pensant se retirer à Santander (Espagne) jusqu'à la fin de ses jours, il a vendu cette maison à ladite fille, Encarnacion, qui s'engageait à payer le même prix en plusieurs versements.
2°Que suite au décès de M. Miguel Andrés Sanchez survenue à Santander, il a laissé divers biens qui, grâce à la vente, ont été transformés en monnaie, actuellement déposée devant l'Avocat du Très Illustre Collège de Santander Don Alfredo de la Vega Hazas y Saïz de Varanda.
3° Que la maison vendue par M. Miguel Andrés Sánchez à sa fille Encarnacion, au décès de son père, resta naturellement la propriété de l'acheteuse, sa fille Encarnacion, mais néanmoins celle-ci restait à ce moment-là, obligé de payer un tiers du prix en attente à sa sœur Genoveva, résidant à Toulouse (France), et un autre tiers à la personne qui conclut ce contrat avec elle.
4° Que pour régler la différence de prix qu'Encarnacion doit à sa sœur Modesta Pilar, il a été convenu ce qui suit.
STIPULATIONS
Premièrement : Mme Modesta Pilar se considère entièrement payée pour la partie du prix que lui doit encore sa sœur Encarnacion, située à Santander et déposée comme nous l'avons dit dans la deuxième partie de l'exposition.
Deuxièmement : Que Mme Encarnacion Andrés Nieto renonce, conformément à ce qui précède, à sa part de l'héritage déposée à Santander (Espagne) en espèces, en faveur de sa sœur Modesta Pilar, et en transfère désormais la propriété.
Troisièmement : Que ce contrat soit également signé par Encarnacion Andrés Nieto à Paris (France) et par Modesta Pilar Andrés Nieto à Montréal (Canada), et ni la première ne pourra réclamer quoi que ce soit, pour quelque raison que ce soit, sur l'héritage de son père en Espagne, ni la seconde ne pourra réclamer n'importe quoi sur le prix en attente de la maison, que leur père a vendu à sa fille Encarnacion.
Quatrièmement : Que les frais occasionnés par ce contrat et les services d'envoi de Mme Modesta Pilar Andrés Nieto à Montréal (Canada), du montant des deux frais héréditaires, seront supportés par le gisement de monnaie existant à Santander.
inquièmement : Ce contrat sera complété au moment où les deux parties contractantes auront en leur possession la copie signée de l'autre.
Sixièmement : Tout doute qui pourrait surgir concernant la représentation de ce contrat, tous deux seront soumis à la décision de l'avocat du Très Illustre Collège de Santander Don Alfredo de la Vega Hazas y Saiz de Varanda.
Et comme preuve du respect le plus absolu de chacune des clauses et dispositions du contrat, nous l'avons signé respectivement à Paris et à Montréal dans un seul but.
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En 1959, mon père lassé de circuler à mobylette, acheta une 4 CV pour se rendre à son travail et pendant l'été nous avons pu aller à Toulouse. Mon oncle lui s'était rendu à son tour à Grenade et pouvait nous donner des nouvelles de la famille.
C'est lors de leur voyage en Europe en 1960 avec mon oncle et mon cousin Ramonin, né en 1958, que ma tante Pilar se rendit à Santander pour pouvoir mettre en œuvre cet accord et un document officiel fut rédigé. Ma tante Geneviève, quant à elle suivit le processus normal de succession.
Pour ce voyage, ils avaient acheté une Renault Ondine immatriculée en "transit temporaire" donc exonérée de taxes qu'ils cédèrent à mes parents à leur départ. Elle remplaça la 4 CV.
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LA VIE CONTINUE MAIS DIFFEREMMENT
Le décès du grand-père a quelque peu modifié la vie de la famille et surtout celle de mon père qui retrouvait sa place de chef de famille. Son ulcère apparu dans les années 50, disparut mystérieusement (on peut se poser la question : la situation familiale avait elle été la cause de son apparition ?)
Mes parents étaient enfin libres de leurs achats et de leurs décisions.
Le tout-à-l'égout ayant été installé dans notre rue, ils décidèrent de faire installer une salle de bains avec des WC, dans cette maison qui n'en disposait pas encore. Fini le cabanon dehors, et finie la corvée du vidange de la fosse ! Cela était un réel progrès.
Le choix de la boutique de Neuilly sur Marne se révélait une bonne option, mon père avait réussi à se faire une nombreuse clientèle et voyait ainsi son travail rémunéré à sa juste valeur.
Il faut aussi dire que nous étions au début d'une forte croissance économique voyant le niveau de vie de la population s'améliorer. C'était aussi le début de l'apparition des grandes surfaces commerciales et l'entrée dans une société de consommation.
A partir de 1961 nous ferons le voyage en Espagne presque chaque année avec ou sans Rafaël. Et ma mère, lors de chaque passage à Grenade, qui avait du mal à supporter l'attachement de mon père à sa famille, lui faisait des crises de jalousie. C'était pénible pour tout le monde, même pour nous qui n'en comprenions pas trop la raison.
Nous irons aussi régulièrement à Toulouse pour y voir mon oncle Rafaël et aussi ma tante Geneviève.
C'est aussi au cours de ces années-là que deux ou trois soirées culturelles furent organisées dans une salle de Champigny sur Marne dont l'objet était de réunir des réfugiés espagnols autour du drapeau républicain. Lors de l'une de ces soirées nous avons assisté, entre autre, à un tour de chant de Paco Ibañez. Ces rencontres m'ont fait prendre encore plus conscience de mes racines ibériques et du vécu de mes parents.
En 1961, c'est pour moi le changement d'établissement, je vais intégrer la 4ème dans un lycée technique au Perreux sur Marne qui seul, proposait l'espagnol en option 2ème langue et qui, de plus, me permettait de me préparer à la vie professionnelle. Je passais un CAP Employée de bureau à la fin de la seconde et en fin d'année je décidais de ne pas aller plus loin dans les études. Je ne fus pas non plus incitée à le faire, la poursuite des longues études n'était pas dans la culture familiale.
Pendant ces années "lycée", chaque semaine mon père me donnait de l'argent pour payer les tickets de bus et un peu plus, mais pour me faire un peu d'argent de poche, je vendais des légumes sur le marché le dimanche été comme hiver, j'étais payée 5 francs pour la matinée. C'était particulièrement difficile en hiver et je rentrais frigorifiée à la maison, mais j'étais fière de gagner ces quelques sous par moi-même.
A cette époque, j'allais souvent à la cordonnerie pendant les vacances scolaires et mon père me confiait quelques petits travaux comme recoudre à la main les plateaux de chaussures ou les cartables en cuir à la période avant la rentrée, les cartables devaient servir plusieurs années. Une année, il fit une crise de coliques néphrétiques et je fus chargée d'ouvrir la boutique pour pouvoir servir les clients venant chercher leurs chaussures.
Avec Paqui nous devions préparer les petits cartons numérotés qui étaient remis aux clients lors du dépot et dont le double était attaché aux chaussures. Cela facilitait la tâche quand les clients venaient récupérer leur bien.
Au cours de l'année 1963 mon père eut des difficultés pour marcher le médecin diagnostiqua de l'artérite des jambes et lui dit que s'il n'arrêtait pas de fumer il ne verrait pas Malou grandir. Il s'arrêta aussitôt mais la nicotine avait déjà fait son œuvre et quelques années plus tard il développa de l'angine de poitrine.
Alors moi, avec ma naïveté d'adolescente, je pensais que dans le cas où mon père nous quitterait, d'une part je ne serais plus à charge mais de plus je rapporterais un salaire à la maison pour permettre à ma mère d'élever mes deux sœurs. Fort heureusement il n'en fut rien.
En janvier 1965, pas de problème de chômage, en quelques jours je trouvais un emploi de sténodactylo à Nogent sur Marne, au Centre Technique Forestier Tropical mais au bout d'un an comme on refusait de me donner la prime de langues que j'étais en droit de demander puisque j'étais amener à faire des traductions, je cherchais un autre job. En avril 1966 je commençais une nouvelle aventure dans une agence de voyages (peut-être était ce prémonitoire !), où j'étais affectée au Service Amérique Latine. J'y suis restée jusqu'en décembre 1968.
En août 1966, nous campons avec mes parents au Cap d'Agde où mon oncle vient nous rejoindre pour passer un moment avec nous et fêter son anniversaire. Dans l'après-midi, je reçois une visite inattendue, c'était Daniel et ma mère qui le connaissait, me dit "c'est le moment de le présenter à ton père", ce que je fis et chose extraordinaire il se trouvait que Daniel fêtait ce jour-là ses 20 ans et mon oncle ses 52 ans. Cela facilita grandement la présentation.
A l'occasion de mes 18 ans, mon père m'incita à passer mon permis de conduire et le 2 janvier 1967, je l'obtenais brillamment du premier coup.
En août 1967, c'était mon dernier périple espagnol en célibataire avec mes parents.
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L'IMMIGRATION DES ANNEES 60
C'est dans ces années-là que la vague d'émigration espagnole commença et comme toujours mon père se fit un devoir d'accueillir ses neveux venus chercher du travail en France.
C'est ainsi qu'en 1959, Paco, fils de ma tante Matilde, arriva en région parisienne, trouva un emploi à Joinville le Pont et tout naturellement vint habiter à la maison où il trouva le gîte, le couvert et le blanchiment en contrepartie d'une contribution financière raisonnable. Tout le monde y trouvait son compte. Il resta chez nous le temps qu'il puisse s'organiser pour faire venir sa femme et ses enfants. Il nous amena également un collègue de travail, espagnol comme lui.
Ses enfants devaient lui manquer et il s'attacha à Malou, qui l'attendait avec impatience à son retour du travail.
La pension ne devait pas être trop mauvaise car après Paco, ce fut son frère Luis, puis Pépé-Luis et Miguel, fils de ma tante Guillerma qui profitèrent à leur tour de l'accueil familial. Ce ne fut pas sans anicroches quand l'un d'entre suggéra que si José avait été fusillé c'était sûrement parce qu'il y avait quelque chose à lui reprocher.
Ils s'installèrent ensuite tous en France et y fondèrent leur famille, ne retournant en Espagne que pour les vacances. Nous nous retrouvions réunis pour les fêtes de fin d'année.
De son côté mon oncle Rafaël accueillit Pépé, frère de Paco, à Toulouse. Il avait 3 enfants, Joseph, Edouard et Nathalie. J'ai encore des contacts avec un de ses petits-fils, Guillaume que nous avons eu l'occasion de rencontrer lors de récitals. C'est un musicien-chanteur qui métisse son répertoire de ses origines espagnoles et occitanes et de ses voyages en Afrique du Nord et en Argentine. J'adore ce qu'il fait.
Toujours dans cette idée d'aider la famille, mon père fit venir Pépé, Antonio et Asuncion, 3 des 5 enfants de mon oncle José, par l'intermédiaire d'un de ses clients propriétaire d'une ferme près de Toulouse pour laquelle il cherchait des métayers. Lors de chaque passage à Toulouse nous ne manquions pas de leur rendre visite.
Pépé avait 3 enfants dont le dernier était né en France. Antonio avait 3 enfants, nés en France et Asuncion s'était mariée avec Dominique, et a eu 2 enfants nés en France également.
Eux aussi s'installèrent définitivement en France et je compte quelques cousins et petits cousins "Rozon" ou "Roson" (les deux orthographes étant utilisées dans la famille) dans le sud-ouest et même au Canada.
La présence de mes cousins occasionnait une lourde charge de travail à ma mère et c'est tout naturellement et avec beaucoup de plaisir que je m'occupais de Malou chaque fois que cela pouvait soulager ma mère. C'est ainsi, par exemple, qu'elle fit ses premiers pas avec moi. Nous devînmes très proches. Et elle me considérait un peu comme sa deuxième maman.
A suivre ....... Chapitre 4 : Il y a du mariage dans l'air