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Histoire de rôle …. Ibn Battûta, pèlerin au long cours.

28 Juin 2016 , Rédigé par niduab Publié dans #Histoire de rôles

J’avais entendu parler du grand explorateur Ibn Battûta dans les années 70 lorsque je vivais au Maroc. Je ne me souviens plus lequel de mes bons amis et néanmoins collègues de travail, Ben-Bahran ou Zalari, m’avait raconté la fabuleuse histoire de cet explorateur-poète-historien-philosophe. Ce nom était resté dans ma mémoire et y est revenu quand j’ai lu l’admirable roman de Mathias Enard « La rue des voleurs » dont j’ai fait un billet en août 2015 dans lequel j’écrivais : « …attardons un instant sur Ibn Batouta, le grand explorateur, le Marco Polo de l'Islam, voyageur, écrivain ou conteur berbère du 14ème siècle qui, de 1325 à 1350, a parcouru tout le monde musulman, voire plus loin, du Maghreb au Moyen-Orient, de l'’Afrique noire (Tombouctou Somalie et Zanzibar) aux lointains et vastes territoires d’Asie (Inde et Chine). Cette figure historique est très présente tout au long du livre… » Je ne pouvais guère dire plus sur ce personnage aussi ai-je mis un lien avec biographie sommaire que proposait Wilipedia. Pour compenser cette faiblesse j’ai reproduis un paragraphe du dernier chapitre du livre de Mathias Enard où il raconte une jolie histoire qu’il attribue à Ibn Battûta.

J’ai retrouvé dans mes archives de grenier un remarquable hors série du Point consacré aux voyages qui ont changé le monde. J’y ai trouvé une présentation de l’explorateur par le journaliste Jérémy André que je propose : 

« J’abandonnais ma demeure comme des oiseaux abandonnent leur nid  » se souviens Muhammad Ibn Battûta. En juin 1325, à 21 ans, cet étudiant en droit coranique quitte sa ville natale, Tanger. Il pense y revenir d’ici dix-huit mois, le temps d’accomplir son hadj, le grand pèlerinage de La Mecque. L’un des devoirs sacrés du musulman. Il veut en profiter pour se former sur le chemin, avec l’espoir d’obtenir un jour un poste de cadi (juge). Mais à a ligne droite, Ibn Battûta préfère les arabesques. Sa soif de voyage va l’emporter toujours plus loin.

A son arrivée au sud de l’Egypte, le passage sur la mer Rouge  est bloqué. Au lieu de contourner l’obstacle au plus court, il passe par la Syrie, puis par l’Irak et la Perse. En 1327, enfin, il atteint La Mecque, qu’il quitte trois ans plus tard, pour suivre la côte de l’Afrique Est, jusqu’à Zanzibar. Ensuite il remonte vers l’Anatolie, péninsule située à l’extrémité occidentale de l’Asie, et atteint Constantinople, encore aux mains des chrétiens. Delà, il se perd dans l’immense empire tatar, qui s’étend sur toute l’Asie centrale. Après Samarkand (aujourd’hui en Ouzbékistan), il gagne l’Inde en 1333. Il y restera huit ans,  au service du sultan de Delhi, le cruel Muhammad Ibn Tughlûq (v.1300-1351) qui lui octroie un poste de cadi.

C’est l’occasion pour lui d’observer les populations locales. Dans ses récits de voyages, il décrit une scène de sati, l’auto-immolation des veuves. Cette pratique qui doit son nom à une épouse du dieu hindou Shiva, était à l’origine réservée aux membres de la caste des guerriers, les kshatriyas : les femmes préféraient mourir plutôt que d’être livrées aux conquérants. S’il manque de s’évanouir face à l’horreur de cette mort, Ibn Battûta essaie de comprendre la signification religieuse de ce suicide rituel, l’union avec la divinité.

En 1342, Ibn Battûta, meilleur ethnologue que politique, tombe en disgrâce et fuit Delhi au prétexte d’une ambassade en Chine. Le sort s’acharne alors contre lui : sa suite se perd en mer et il sillonne le sud du continent indien, passe par les ports de Goa et Calicut, puis vogue vers les Maldives, Ceylan, le Bengale, Sumatra, la Malaisie et le Vietnam. Enfin il débarque en 1346 en Chine et remonte jusqu’à Huangzhou (dans le Zhejlang, près de Nankin), alors l’une des plus grandes villes du monde. Il n’ira pas plus loin. De retour en Inde en 1347, il préfère éviter Delhi et se hâte vers le Maghreb, passant par la Syrie, la Palestine et l’Egypte, frappée par la peste. Au printemps 1350 il est enfin à Tanger, pour honorer la tombe de sa mère, fauchée par l’épidémie. 

Mais deux ans plus tard, le voilà reparti, chargé par le sultan du Maroc d’une mission au Mali. Il traverse le Sahara, descend le Niger, visite Tombouctou avant qu’elle ne devienne le grand centre islamique du Sahel, et rentre définitivement en 1354. En l’honneur de son souverain, il consent à dicter sa rihla, son récit de voyage, à un poète de la cour. Ce récit n’est pas celui de l’explorateur : à quelques rares exceptions près, ce périple de plus de cent mille kilomètres s’est fait d’une extrémité à l’autre d’un seul univers, le Dar al-Islam, le monde musulman. Romancier dans l’âme, son auteur n’hésite pas inventer des royaumes ou à emprunter à d’autres la description de villes qu’il n’a pas visité comme Pékin. Mais la multiplicité des voyages de ce globetrotteur avant la lettre  fait de sa rilha un témoignage hors du commun, qui va nourrir pendant des siècles la connaissance du Dar al-Islam.

S’il n’a pas changé le monde, son témoignage a largement contribué à former les jugements… et les préjugés, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Islam.

 

(A suivre) 

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