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Histoire de rôles........Sieyes, la clé de la Révolution française.

2 Novembre 2020 , Rédigé par niduab Publié dans #Histoire de rôles

L'an dernier, (le 15 décembre pour être précis) j'ai fait sur ce blog un article consacré au livre de Jean-Denis sur l'Affaire Dreyfus. J'avais découvert et dévoré ce récit au cours des années 90 par un livre emprunté en bibliothèque. En novembre 2019 j'ai vu en salle le magnifique film de Polanski. Quelques jours plus tard je me suis procuré le livre, en version livre de poche. J'ai d'abord constaté que le film et le livre sont proches ; notamment avec la parade d'exécution de la peine, en scène d'ouverture pour le film et en prologue pour le récit. Ce coup de cœur pour ce livre de Jean-Denis Bredin m'a conduit à me procurer un autre livre historique de cet auteur, à savoir Sieyès, la clef de la Révolution française et toujours en livre de poche et également avec l'idée de faire connaître par mon blog ce livre et peut-être surtout présenter le personnage. Le travail fut cette fois un peu plus difficile que pour l'Affaire: j'ai commencé ce livre au cours du premier confinement, mais en perdant quelque peu, au fil des pages, le personnage principal je m'en suis un peu fatigué à mi-chemin des 760 pages du livre ; j'ai alors fait une assez longue pause avant d'en reprendre la lecture début septembre avec quelques heures de rattrapage préalables et surtout en relisant le prologue. Ce travail fut aussi plus difficile parce qu'il n'y a pas eu de film pour évoquer Sieyès. Je me suis finalement persuadé que je ne devais pas présenter ce livre, très complet sur l'histoire de la révolution, mais plutôt consacrer cet article au rôle de Sieyès, et même parfois à son absence, dans la Révolution. Et comme presque tout est dit dans le prologue de Bredin (pages 11 à 18), j'ai choisi d'en faire le la partie essentielle de cet article. (en couleur bleue). Un prologue dont j'ai quand même du alléger quelques paragraphes.  

Biographie sommaire :  Né à Fréjus, le 3 mai 1748, Emmanuel Sieyès fut député de Paris

aux États généraux, il fut le rédacteur du serment du Jeu de Paume, proposa la fusion des trois ordres et la constitution des États généraux en Assemblée constituante ; il eut l'idée de la division de la France en départements ; membre de la Convention, il vota la mort de Louis XVI sans sursis ni appel au peuple ; il présida la Convention, et, plus tard, il fit partie du Conseil des Cinq-Cents. Sieyès fut membre et président du Directoire, puis consul ; il prépara le 18 brumaire et sous l'Empire, il fut créé comte et sénateur ; il devint président du Sénat. Il avait été ambassadeur à Berlin en 1798.Il fut encore membre de l'Institut en 1795, dans la classe des Sciences morales et politiques ; à l'organisation de 1803, il fit partie de la deuxième classe dont il fut président et où il occupa le fauteuil de Jean-Sylvain Bailly ; exclu par l'ordonnance de 1816, il fut exilé en Hollande et ne rentra en France qu'en 1830 ; il fit partie de l'Académie des Sciences morales et politiques de 1832. Il mourut en 1836.

Prologue :   De l’abbé Sieyès que sait-on ? Qu'il publia en janvier 1789 un libelle « Qu' que le Tiers État ? » qui le rendit célèbre. Qu'élu député aux États Généraux il ouvrit la Révolution en appelant les représentants du Tiers État à se constituer en « Assemblée nationale ». Que dix ans plus tard, membre du Directoire, il organisa avec Bonaparte le 18 Brumaire, et qu'il ferma la Révolution, la remettant à celui qu'il croyait le plus civil des militaires. Qu'il eut ainsi cette étrange destinée, d'être l'initiateur de la Révolution en 1789, puis son liquidateur en 1799. On sait parfois cela .., parfois aussi que Sieyès illustra, en formules restées fameuses, les principaux moments de la Révolution ; qu'il proclama hardiment, à la veille des États Généraux, que le Tiers État était « Tout », un Tout traité  comme s'il n'était « Rien » ; qu'il résuma ce qu'il fit, ou ne fit pas, sous la Terreur, en constatant simplement « j'ai vécu »  ; enfin qu'il annonça, quand agonisait le Directoire,  « je cherche une épée » pour clore la Révolution. Le reste de son action, de sa vie, est à peu près ignoré. Rarement on sait qu'il exerça, sur l'Assemblée constituante, une influence décisive ; qu'il se tut pendant la Terreur, mais qu'il réapparut au lendemain de thermidor et repris une place importante ; qu'il fut en 1798 l'ambassadeur du Directoire à Berlin ; que nommé Directeur en mai 1799, il réussit à devenir le maître du pouvoir. Sait-on qu'après avoir fait le 18 Brumaire avec Bonaparte il abdiqua peu à peu de son rôle, enseveli, par Napoléon, sous les honneurs ? Qu'il connut encore le temps d'une longue vieillesse, de l'exil, de l'oubli, enfin qu'il mourut en 1936, dans l'indifférence générale ? Que Sieyès couvrit ainsi de sa présence ou de son ombre, presque un siècle de l'histoire de France ! 
L'homme semble aussi méconnu que son rôle. La plupart de ses contemporains ont laissé de lui des portraits sévères, souvent injurieux. Talleyrand, qui fut souvent proches de lui dans l'action, l'a décrit comme un modèle d'inhumanité...[..]... Théodore de Lameth, l'un de ses adversaires à la Constituante, l'a peint orgueilleux et cynique. Pour Barras, qui ne lui pardonnera pas le 18 Brumaire, Sieyès n'était qu'un prêtre haineux, cruel, lié à tous les hommes corrompus de son temps...[..]...Plusieurs  ont déclaré qu'il avait peur de tout, peur pour sa carrière, peur pour sa vie, peur pour sa fortune. Fouché l'a décrit terrorisé, prêt au terrorisme pour se débarrasser de ses ennemis, et Napoléon à peint son complice de Brumaire, devenu Consul, affolé, inventant mille périls dans leur palais commun. Même Benjamin Constant qui fut son ami le décrira hanté par la peur...[..]... La crainte et l'intérêt auraient-ils donc été les vrais ressorts de cet apôtre de la liberté ? Sans doute Sieyès a-t-il occupé trop de place en son temps pour plaire à ses contemporains. Et il était trop orgueilleux pour s'attacher à séduire.
Tout n'est pas de cette encre-là. Quelques-uns de ceux qui connurent Sieyès ont dressé de lui des portraits attentifs, même élogieux. Ainsi Mme de Staël qui aimait la compagnie de l'illustre abbé, a beaucoup admiré cet esprit de première force et de la plus grande étendue, tout en regrettant son humeur misanthrope. Benjamin Constant juge comme Mme de Staël, que ce fut un homme s'un esprit immense mais il déplore comme elle son peu de sympathie pour l'espèce humaine... [..]...Rares sont les observateurs de Sieyès qui ont bien voulu le regarder sans préjugés. Ceux-là ont généralement décrit sa force d'abstraction, la puissance de son esprit. Mais ils ont regretté son dogmatisme, son intransigeance. C'était résume Mignet, qui fut son confrère à l'Institut, plus un métaphysicien qu'un homme d'État. « Ses vues se tournaient naturellement en dogmes..... , à chaque époque, il fallait qu'on accepte sa pensée ou sa démission.»... [...]... Ambitieux et détaché. Capable d'intrigues très savantes pour venir au pouvoir, et d'y renoncer soudain, par humeur ou par peur. Téméraire en de grandes occasions, craintif en d'autres. Apte aux coups d'éclat comme aux longues patiences. Le plus absolu des théoriciens, mais aussi le plus politique, conduit par ses dogmes mais exempt de scrupules. Solitaire et se voulant entouré d'amis, n'aimant pas les gens du commun, mais haïssant les privilégiés....., on n'en finirait pas d'observer les traits contraires imputés à Sieyès...[..]...

Et l'œuvre de Sieyès souffre des mêmes incertitudes que sa personne. Nous n'imaginons pas aujourd'hui la gloire qui fut la sienne en son ton. Pendant toute la révolution, il jouit d'une réputation colossale, il incarne la victoire sur l'Ancien Régime. Quand, élu directeur en 1799, il quitte la Prusse où il était ambassadeur et rentre en France, il est célébré comme un sauveur, accueilli par des manifestations populaire d'une rare ampleur. A la veille du 18 Brumaire, il semble évident que Sieyès seul à la force de transmettre la légitimité révolutionnaire, il est resté le symbole de la Révolution et Bonaparte  ne s'y trompe pas. En Allemagne il a été comparé à Descartes, à Kant, loué comme un grand philosophe. Pour Mme de Staël, ses écrits, ses opinions, ont ouvert un temps nouveau en politique. Carré de Malberg a vu en lui l'un des fondateurs du droit public moderne. Il aurait substitué la souveraineté de la Nation à la souveraineté du Roi, et ainsi fait la Révolution. Il serait un des rares politiques qui ont changé le cours de l'histoire....[..]... Mais alors comment expliquer que d'importants historiens de la Révolution aient à peine à peine gardé le souvenir de Sieyès......, Que la mémoire populaire ne sache rien ou presque de lui ? Comment Sieyès aurait-il-pu jouer un tel rôle dans l'histoire des hommes, dans l'histoire des idées, et être resté si mal connu, si méconnu?... [..]....Qui était Emmanuel Sieyès ? Quelles traces a-t-il laissées ? Ce livre tente de regarder d'un peu près, sans préjugés s'il se peut, l'étrange philosophe qui ouvrit, ferma la Révolution, et sans doute l'explique mieux qu'aucun autre, l'un des rares intellectuels qui ont secoué l'Histoire, et peut-être fabriquer des instruments de pensée. Ce pourquoi l'antipathique abbé Sieyès vaut d'être rencontré.

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