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No pasaran..... Salud, coronel !

29 Janvier 2021 , Rédigé par niduab Publié dans #no pasaran

Ça faisait quelques temps que je voulais faire un nouvel article dans la rubrique «No pasaran» où j'ai évoqué, pour l'essentiel, la guerre d'Espagne vécue par la famille de Pilou, puis la migration de Luis, son père, et de Incarnation, sa mère, qui se rencontrèrent à Toulouse à la fin da seconde guerre mondiale. Pour faire ces articles j'avais les souvenirs de discussions avec mes beaux-parents et l'appoint de Pilou. Et puis il y avait aussi le mémoire d'études universitaires de Cécile, notre fille. J'ai aussi fait quelques billets pour évoquer le poète Federico Garcia Lorca originaire, comme la famille paternelle de Pilou, de Fuente Vaqueros, un village proche de Grenade, et qui fut fusillé comme l'un des frères aînés de Luis, lors des journées de terreur de fin juillet à mi-aout 1936. Au total je n'ai fait que 24 articles de cette rubrique en 14 ans de blog. Fin décembre 2020 j'ai trouvé un recueil de poésie de Federico Garcia Lorca qui m'a permis de faire un court billet pour éviter d'avoir une année blanche : Ouf ! Et voilà qu'un mois plus tard, alors que je fais un peu de rangement dans des armoires du grenier je tombe sur un magazine l'Histoire, de juin 1996 (n° 200) dont le dossier principal est « 1936, la guerre d'Espagne ». Dans ce dossier je trouve un article particulièrement intéressant «L'odyssée de Malraux » de Michel Winock, un historien que j'apprécie et dont j'ai deux de ses livres : « Mendes-France » et «Clémenceau ». En lisant cet article de Winock je me suis rappelé que j'avais aussi dans ma bibliothèque  « Malraux, une vie dans le siècle » de Jean Lacouture. J'avais de quoi faire un article intéressant ! Pour le titre de cet article je retiens celui du chapitre 4 (page 211) du livre de Lacouture. J'ai des informations sur l'engagement de Malraux pour soutenir la République Espagnole contre le coup d'état des troupes de Franco. Reste à en faire un article digne des auteurs sans faire trop, trop long. 

C'est le 21 juillet 1936 que Malraux arrive à Madrid, en compagnie de sa femme Clara. Le pronunciamiento des quatre généraux Sanjurjo, Mola, Goded, et Franco, n'avait pas totalement réussit, le peuple républicain résistait : à Barcelone, à Valence, à Malaga, à Madrid, au Pays Basque, les factieux étaient mis en échec par les organisations ouvrières et les autonomistes. Ceux qu'on allait appeler les franquistes étaient obligés, pour prendre le pouvoir, à une longue et sanglante conquête du territoire espagnol à partir du sud qu'ils ont conquit par surprise. Ils ont pourtant avec eux la plus grosse partie de l'armée espagnole. Que venait faire l'auteur de La Condition humaine dans cette histoire ? Il est clair qu'il était de tout cœur pour la République. En fait, il semblerait que c'est Pierre Cot, le ministre de l'air du Gouvernement du Front populaire qui lui a demandé, dès le 18 juillet (date de la prise de Grenade par les factieux) d'aller en Espagne pour juger de la situation. Malraux, le point levé et le fraternel Salud à la bouche sillonne Madrid, se rend à Barcelone où il rencontre le leader anarchiste Durruti, et d'autres responsables syndicalistes, ou politiques. Il retient de ces rencontres la faiblesse mortelle de la défense républicaine et surtout l'absence d'aviation. La moitié des cinquante appareils dont disposait le général Herrera commandant (resté loyal) de l'armée de l'air étaient basés au Maroc. Ils avaient atterri le 19 juillet à Séville, ignorant que la ville était déjà aux mains du putschiste Queipo de Llano, qui avait saisi les appareils et fait fusiller les pilotes. Malraux rentre en France le 28 juillet et se précipite au ministère de l'air où il confirme à Cot et Lagrange qu'il faut fournir des avions à l'Espagne républicaine. Il faut faire vite car dans quelques jours, le 8 août, le gouvernement de Léon Blum signera le pacte de non-intervention initié par la Grande-Bretagne et que signera aussi l'URSS de Staline mais encore l'Allemagne d'Hitler et l'Italie de Mussolini. 
 Des avions pour l'Espagne ? Quelques-uns sont déjà à Toulouse. Pressé par Cot et Lagrange, Blum accepte, jusqu'à la signature du pacte, de fermer les yeux : les avions (une vingtaine de potez-540 et quelques unités de Bloch 200 et 210 sont disponibles. L'écrivain n'eut pas de mal à recruter des mécaniciens ; il eut en revanche quelques difficultés pour les pilotes et dut se résigner à recruter des mercenaires (aventuriers, vieux chevaux de retour, anciens de la guerre de 14-18) mais finalement les avions arrivèrent à bon port.

 Dès le 8 août, Malraux (sans Clara) est de retour en Espagne, à pied d'œuvre à Barajas, l'aérodrome de Madrid. Il a obtenu le droit de former et de commander une escadrille de combattants étrangers qui prendra d'abord l'appellation d'España. Le gouvernement espagnol lui octroie le grade de coronel pour prix des efforts de mobilisation et d'équipement qu'il a déjà accomplis. 
 On se référera souvent à son roman "L'Espoir" pour décrire l'action de Malraux en Espagne du début d'août 1936 à fin février 1937,
même s'il faut se garder de lui attribuer tous les gestes et tous les propos de Magnin le personnage de L'Espoir qui le représente. Mais l'enquête auprès des témoins les moins récusables recoupent les principales indications du roman. Que Malraux, aviateur de rencontre inapte au pilotage sans aucune compétence en matière de bombardement ou de navigation, ait pu être un combattant efficace, on se gardera de l'affirmer. Mais ce qui est certain, c'est d'abord son invraisemblable courage physique en imposait assez à ses compagnons pour lui assurer une réelle autorité morale. De fait, avec l'escadrille España Malraux s'engage dans l'opération Medellin, qui assure la sauvegarde de Madrid en barrant la route à la colonne du général Asensio. L'escadrille España qui se fixe à Valence, prendra en novembre le nom d'escadrille Malraux ; les volontaires ont alors remplacé les mercenaires. En décembre 1936, a lieu l'épisode de Teruel (autre grand moment du roman de Malraux). Il s'agissait pour les républicains de réduire la zone tenue par les franquistes au sud des plateaux d'Aragon et, à cet effet d'isoler la ville. Cette bataille de diversion devait servir à soulager Madrid. L'escadrille André Malraux vient en soutien des forces républicaines et des Brigades internationales, par des bombardements quotidiens.  Bien que n'ayant jamais manié une arme ni piloté un avion il participe à soixante-cinq missions aériennes, et prend part, en août, aux combats contre les troupes franquistes en particulier à Tolède, Madrid, Guadalajara et Teruel. Il est deux fois blessé. En revanche, les appréciations de ses supérieurs militaires dont on a connaissance ne lui sont pas favorables. Antonio Camacho Benitez, chef de l'aviation gouvernementale, écrit dans un rapport : « Après l'attitude et l'action de Malraux il conviendrait soit de lui imposer la discipline, l'expulser ou le fusiller ». Il ajoutera dans son livre Virage sur l'aile : « Je ne doute pas  que Malraux fût à sa manière un progressiste, ou qu'il cherchât de bonne foi à nous aider. Peut-être aspirait-il à tenir chez nous un rôle analogue à celui que joua Lord Byron en Grèce ? Je ne sais pas mais je peux affirmer, c’est que si l’adhésion de Malraux, écrivain de grand renom, pouvait utilement servir notre cause, sa contribution en tant que chef d’escadrille s’avéra tout à fait négative.»
 L'escadrille Malraux fait ses dernières sorties au début de février 1937 dans le secteur de Malaga, où elle doit venir en aide aux réfugiés poursuivis par les volontaires fascistes italiens qui débarquent à Cadix. Les avions sont hors d'état, les hommes sont morts ou hors de combat, la relève est nécessaire.  L'engagement militaire de Malraux en Espagne est achevé ; son engagement politique continue. A la fin de février 1937, l'écrivain est aux États-Unis, où, de la côte Est à la côte Ouest il entreprend une tournée de conférences en faveur des républicains espagnols. Le personnage fascine, son aventure parait follement romanesque et ses récits lyriques enflamment les auditoires. On se méfie cependant de ses sympathies communistes. 
En effet durant toute la durée de son engagement en faveur de l'Espagne républicaine, Malraux évite, de se montrer trop critique envers les communistes et l'U.R.S.S., qu'il considère comme seuls capables de faire régner la discipline nécessaire au salut de la république. Rentré en France il écrit L’Espoir qui est publié en décembre 1937. Il passe l’hiver à Paris puis Il retourne en Espagne pour tourner le film Espoir, sierra de Teruel. Le tournage commence le 4 août 1938 à Barcelone au prix de nombreuses difficultés et se poursuit à Tarragone et dans la sierra de Montserrat. En janvier 1939 l’équipe du film doit évacuer Barcelone sur le point de tomber aux mains des nationalistes. Le film fut terminé en France.

Rappel sources : Les paragraphes de couleur rose sont extraits et quelque peu allégés de l'article de Michel Winock dans le magazine Histoire. Les paragraphes de couleur bleue sont tirés du livre de Jean Lacouture. J'ai conservé la couleur noire pour mon introduction et pour quelques parties de textes de liaison provenant du Malraux de wikipedia. Les phrases  en rouge renvoient, en cliquant dessus, à d'anciens articles je recommande notamment Grenade. 

 

Ci dessus André Malraux (à droite) devant un Farman190, en compagnie du commandant d'aviation Edouard Corniglion-Molinier (à gauche) futur ministre de la IV ème République et mécanicien Maillard (au centre)

Ci dessus André Malraux (à droite) devant un Farman190, en compagnie du commandant d'aviation Edouard Corniglion-Molinier (à gauche) futur ministre de la IV ème République et mécanicien Maillard (au centre)

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